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Atterrissage retardé, destination incertaine

L’étonnante fermeté du marché du travail aux Etats-Unis devrait inciter la Fed à différer la baisse des taux.

Le plan de route annonçant une réduction du taux des «Fed funds» à 4,6% en fin d’année est mal étayé par les données récentes, même si le président de la Fed Jerome Powell a réaffirmé mardi passé la perspective d’une baisse des taux d’intérêt avant la fin de l’année.
Keystone
Le plan de route annonçant une réduction du taux des «Fed funds» à 4,6% en fin d’année est mal étayé par les données récentes, même si le président de la Fed Jerome Powell a réaffirmé mardi passé la perspective d’une baisse des taux d’intérêt avant la fin de l’année.
François Christen
One Swiss Bank à Genève
09 avril 2024, 19h30
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Sur les marchés financiers, les bonnes nouvelles sont parfois mauvaises, et vice-versa. Alors que la Réserve fédérale américaine (Fed) ne cesse de souligner l’importance des données pour calibrer sa politique monétaire, le dernier rapport de l’emploi remet en question les réductions de taux d’intérêt qui se profilaient à l’horizon. L’augmentation soutenue des effectifs (303.000 en mars, 276.000 en moyenne au cours du premier trimestre) met en lumière un marché du travail très robuste, à peine affecté par le relèvement épique des taux d’intérêt amorcé au printemps 2022.

L’enquête conduite auprès des ménages confirme la vigueur du marché de l’emploi, car le taux de chômage a reflué de 3,9% en février à 3,8% en mars, en dépit d’une augmentation bienvenue de la main-d’œuvre et du taux de participation. Le redressement de la durée hebdomadaire de travail à 34,4 heures traduit aussi un renforcement de l’activité. La progression modérée du salaire horaire moyen (0,3% mensuel, 4,1% en glissement annuel) entretient toutefois l’espoir d’un «atterrissage en douceur», bien que le terme atterrissage paraisse de moins en moins approprié pour décrire la trajectoire de l’économie américaine.

Le plan de route annonçant une réduction du taux des «Fed funds» à 4,6% en fin d’année est mal étayé par les données récentes, même si le président de l’institut Jerome Powell a réaffirmé mardi passé la perspective d’une baisse des taux d’intérêt avant la fin de l’année. Dans le même registre, sa collègue gouverneure Adriana Kugler laisse entrevoir un assouplissement conditionné par un reflux persistant de l’inflation. Le discours tenu par la gouverneure Michelle Bowman accorde toutefois une grande place aux facteurs qui pourraient entraver le reflux de l’inflation et n’exclut pas complètement la possibilité d’un relèvement accru.

Atterrissage retardé, destination incertaine

Attentifs et lucides, les acteurs du marché des futures sur le taux des «Fed funds» expriment des doutes croissants à l’égard des projections du comité de politique monétaire (FOMC). La première baisse est désormais attendue le 31 juillet plutôt que le 12 juin et le niveau escompté en fin d’année s’inscrit au-dessus de 4,6%. Dans un contexte fébrile, les chiffres d’inflation attendus ce mercredi revêtent une importance particulière après les mauvaises surprises des mois précédents. Le rebond des rendements observé depuis le début d’années, de 3,8% à plus de 4,4% pour le T-Note à 10 ans, n’est peut-être pas terminé.

En Europe, les rendements en euros sont soumis à des tensions modérées alors que le Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) s’apprête à tenir une réunion qui devrait se solder par un statu quo, assorti de signaux préfigurant une baisse des taux d’intérêt en juin. Bien que l’inflation de la zone euro ait reflué à 2,4% en mars (en première estimation), certains aspects du rapport publié la semaine passée apportent de l’eau au moulin des «faucons attentistes». Hors énergie et alimentation, l’inflation sous-jacente s’établit à 1% sur un mois et 3,1% en glissement annuel. La progression des prix des services, obstinément stable à 4%, reste problématique. Hors zone euro, les rendements des emprunts en livres sterling et en francs suisses sont aussi orientés à la hausse, sous l’influence des Etats-Unis. Le reflux de l’inflation helvétique à 1% en glissement annuel, tant pour l’indice général que pour l’indice excluant l’énergie et l’alimentation, valide le virage déjà opéré par la Banque nationale (BNS) et renforce la pression qui s’exerce sur le franc suisse.