Tous les pays ont mis en place des droits de douane afin de protéger certains secteurs de leur économie par exemple le riz au Japon ou quelques autres produits agricoles en Suisse. Mais Donald Trump utilise ces taxes comme une arme de déstabilisation massive. Il pense à trois usages en particulier: à un effet de levier dans les négociations internationales, à la réindustrialisation du pays et à des recettes fiscales nouvelles. L’histoire montre qu’il se trompe sur toute la ligne.
Mais revenons d’abord à l’une de ses idées d’origine. Selon lui, pour relancer l’industrialisation des Etats-Unis, les «tariffs» sont mieux que des subventions comme dans le Chips Act ou l’Inflation Reduction Act (IRA) de son prédécesseur Joe Biden, qui pourtant ont vu plusieurs grands industriels développer des projets d’implantation d’usines sur sol américain. Mais voilà, Donald Trump déteste simplement ces mesures et répète à longueur de journée que les droits de douane sont non seulement efficaces mais surtout plus rentables.
Cela paraît simple et clair. Et pourtant, c’est totalement faux. Démonstration.
D’abord, imposer des taxes douanières signifie que quelqu’un au bout du compte va payer l’addition et, en général, c’est le consommateur. On estime que lors de la première salve de 2018, cela a coûté plus de 100 milliards de dollars aux consommateurs américains. Cela diminue leur pouvoir d’achat et augmente l’inflation et engendre donc un appauvrissement pour tous.
Le président américain crée donc un affaiblissement généralisé pour rien ou presque
Xavier Comtesse
Ensuite, cela n’a de sens que si les importations sont importantes par rapport à la production intérieure sinon c’est une mesure marginale. Aux Etats-Unis, la part des importations dans le produit intérieur brut (PIB) n’est que de 12%. Ce n’est rien en comparaison de la Suisse où elles se maintiennent à hauteur de 62%. Le président américain crée donc un affaiblissement généralisé pour rien ou presque!
Enfin, relever les droits de douane entraîne des contre-mesures de la part des pays visés et donc un ralentissement des échanges internationaux accompagnés d’une récession. Au final une désindustrialisation aussi pour l’Amérique!
On pourrait alors se demander si des tarifs douaniers plus ciblés seraient efficaces comme, celui qui vise l’acier et l’aluminium? Là encore, Donald Trump manque d’une vision globale car, bien que les besoins en aluminium américain dépendent en grande partie des importations notamment canadiennes (à hauteur de 57%), il faudrait pouvoir le produire sur sol américain avec de l’électricité bon marché. Il n’en est rien, c’est le Canada qui produit cette électricité. Quant à l’acier (seulement 25% d’importation) cela reste marginal pour produire un effet de levier positif sur l’économie.
Donc d’un point de vue rationnel, il n’y a aucune raison d’utiliser un tel outil pour réindustrialiser le pays.
Alors, Donald Trump cherche-t-il autre chose? En fait, il a un modèle historique qu’il adore et veut visiblement copier. C’est le 25e président, le républicain William McKinley, qui lança en 1890, alors qu’il était député, le «Tariffs Act», une loi censée enrichir les Etats-Unis par le biais de taxes douanières élevées (38% à 49,5%). Les résultats furent catastrophiques pour les Américains qui ont souffert d’une hausse des prix et du chômage. Du coup, dès 1892, ils élirent un président démocrate.
Mais l’histoire ne s’arrêta pas là. En 1930, deux républicains Reed Smoot et Willis Hawley remirent les «tariffs» au goût du jour par une nouvelle loi qui porte leur nom. Encore un désastre: l’Amérique et le monde avec entrèrent dans la «Grande Dépression».
L’histoire se répète-t-elle? En tout cas William McKinley est aussi connu pour son goût de l’expansion territoriale: Cuba, Philippines, Hawaï, etc.