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Ceci n’est pas une utopie

Les promesses de l’initiative «responsabilité environnementale» mise au vote le 9 février sont irréalistes.

«La consommation d’énergie par personne a diminué de presque un tiers depuis 2000, celle de matière d’un cinquième et les émissions de CO2 par habitant ont été divisées par deux.»
KEYSTONE
«La consommation d’énergie par personne a diminué de presque un tiers depuis 2000, celle de matière d’un cinquième et les émissions de CO2 par habitant ont été divisées par deux.»
Dominique Rochat
Economiesuisse - Responsable de projets
07 janvier 2025, 19h00
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Et la Suisse deviendra un vrai pays de cocagne! Elle fournira des emplois stables et abondants, ses habitants auront davantage de temps pour vivre, se sentiront moins seuls et mangeront des aliments sains et locaux. En prime, les (grandes) entreprises cesseront leur quête du profit et paieront la nécessaire transformation de notre pays. Rassurez-vous, ce n’est pas une utopie, mais les promesses de l’initiative «responsabilité environnementale», qui sera votée le 9 février.

Il convient toutefois de lire les petites lignes avant de se décider. Les initiants précisent bien qu’il faudra un changement fondamental de l’économie et de la société pour atteindre leurs buts. On peut même le qualifier de radical, compte tenu du délai de dix ans prévu pour faire ce grand saut. C’est aussi l’avis du Conseil fédéral, pour qui il faudrait prendre des mesures drastiques de régulation et d’incitation. Elles provoqueraient des hausses de prix, une réduction de l’offre et auraient d’importantes répercussions négatives sur la société.

Pour être très concret, il s’agirait selon la Confédération de diminuer de 90% l’empreinte carbone par personne en Suisse, de plus de 70% l’empreinte biodiversité ou de diviser par deux l’empreinte azote, en une décennie. Autrement dit, cela nécessiterait un gel plus ou moins complet des activités économiques ou agricoles telle que nous les connaissons. Ces évaluations se basent sur la méthode des «limites planétaires», qui fixe des seuils à ne pas dépasser dans neuf domaines considérés comme cruciaux. Afin d’évaluer si ces seuils sont respectés, tant les activités en Suisse que celles liées aux biens importés sont prises en compte.

La Suisse est l’un des pays qui a réussi à découpler la croissance économique et ses impacts environnementaux

Dominique Rochat

Fort habilement, les initiants placent le fardeau du dépassement des limites sur les épaules des «grandes entreprises», leur bouc émissaire préféré. Mais en réalité, toutes les entreprises seraient touchées et, surtout, les consommateurs. Selon la Confédération en effet, l’alimentation, le logement et la mobilité représentent presque deux tiers de l’impact environnemental de la Suisse. Fait positif, il a baissé ces dernières années, une tendance qui se manifeste aussi dans d’autres domaines. Par exemple, la consommation d’énergie par personne a diminué de presque un tiers depuis 2000, celle de matière d’un cinquième et les émissions de CO2 par habitant ont été divisées par deux. La Suisse est l’un des pays qui a réussi à découpler la croissance économique et ses impacts environnementaux.

Mais ces progrès importent peu aux auteurs de l’initiative. Plutôt que de faire mieux avec moins, ils veulent seulement faire moins. Mais sont-ils vraiment prêts à en assumer les conséquences: moins de salaire, moins d’emplois, moins de recettes fiscales, moins d’AVS et de prestations sociales, moins d’investissements de formation et de recherche, moins de moyens pour l’environnement? Ne vaudrait-il pas mieux commencer par lancer moins d’initiatives jusqu’au-boutistes et inapplicables telle que celle-ci?