La question de la responsabilité envers les générations futures est souvent associée aux enjeux climatiques. Pourtant, la nécessité de se projeter vers l’avenir ne concerne pas que les questions environnementales. Nous devons aussi assurer la pérennité de notre système de prévoyance vieillesse. Cette année 2024 est une excellente occasion de montrer notre capacité à nous projeter au-delà d’un intérêt personnel à court terme, avec des votations qui concernent la stabilité financière tant du premier que du deuxième pilier.
L’AVS fait face à un changement majeur en termes démographiques qui a un fort impact sur le financement des prestations. Si plus de 2,5 millions de personnes bénéficient actuellement d’une rente de vieillesse, le nombre de retraités augmente à un rythme plus rapide que celui des actifs qui financent les rentes. De plus, l’espérance de vie à la retraite croît et les rentes sont ainsi versées plus longtemps.
Deux récentes réformes, Réforme fiscale et financement de l'AVS (RFFA) et AVS 21, ont permis d’apporter un répit, avec une combinaison de hausse des recettes et de réduction des dépenses. La stabilisation financière ainsi obtenue n’est que temporaire. Un déficit dans l’AVS est programmé après 2030, au vu de la réalité démographique. Le Conseil fédéral doit ainsi revenir vers le Parlement dès 2026 avec une proposition de réforme pour le long terme. Dans ce contexte, l’initiative pour une 13e rente, qui annule au passage les efforts récemment entrepris, représente un coup de massue pour la bonne santé des finances du premier pilier. Elle accroît les dépenses de plus de 4 milliards dès 2026, selon les estimations. Ces coûts augmenteront rapidement par la suite.
Les initiants se sont bien gardés de réfléchir au financement de leur généreuse proposition
Catherine Lance Pasquier
Les initiants se sont bien gardés de réfléchir au financement de leur généreuse proposition. Les options crédibles pour trouver les milliards nécessaires ne sont toutefois pas nombreuses. Nous n’échapperons pas à une hausse des cotisations salariales, de la TVA ou à une combinaison des deux. Les actifs, et les personnes avec des revenus modestes notamment, seront touchés de plein fouet.
En fragilisant à long terme les finances de l’AVS, cette initiative représente un danger, en particulier pour ceux qui dépendent de leurs rentes du premier pilier. De plus, une mesure comme la 13e rente, prévue pour tous les retraités sans considération de leur situation personnelle, ne permet pas de répondre avec efficacité à l’objectif de lutte contre la précarité qui touche certains rentiers AVS. Les personnes en difficulté financière ont droit à des prestations complémentaires.
Au lieu d’une mesure arrosoir, il convient de cibler ceux qui ont besoin de soutien sans mettre en danger tout le dispositif. Refuser la treizième rente est un acte responsable, pour contribuer au maintien de cette assurance sociale et solidaire pour les retraités actuels et les générations futures.