«Mission accomplie», s’est exclamé le Conseiller fédéral Guy Parmelin le 21 mars dernier devant la presse lors de la présentation d’un train de mesures visant à garantir la protection des salaires en Suisse. Un compromis obtenu de haute lutte: quatre-vingts séances ont été nécessaires pour trouver un terrain d’entente entre les employeurs, les syndicats et les autorités fédérales et cantonales.
Le nouveau dispositif repose sur des mesures de politique intérieure qui, pour l’essentiel, viennent compléter le plan de protection à trois niveaux (principes, exceptions, clause de non-régression), adopté en décembre dernier par la Suisse et l’Union européenne dans le cadre des accords bilatéraux III.
Ainsi, une procédure centralisée et numérique permet de ramener le délai d’annonce de huit à quatre jours, sans affecter le niveau de protection des travailleurs. De même, l’obligation de porter un badge sur les chantiers publics doit compenser la réduction du champ d’application de la garantie financière qui, désormais, ne sera exigée qu’en cas de récidive.
Les employeurs se montrent en revanche sceptiques à l’égard de la proposition du Conseil fédéral de mieux protéger les représentants élus des salariés contre le licenciement.
Marco Taddei
S’agissant du remboursement des frais professionnels, il est prévu d’adapter la loi sur les travailleurs détachés afin de garantir en droit suisse les frais suisses. Des distorsions de concurrence sur le marché du travail pourront ainsi être évitées.
L’accord proposé vise aussi à garantir les conventions collectives de travail (CCT) qui sont aujourd’hui déjà étendues. Pour rappel, l’extension d’une CCT ne peut être prononcée que si trois conditions sont remplies (les quorums des employeurs, des salariés et mixte). Or, à l’heure actuelle, un nombre important de ces CCT, qui s’appliquent également aux travailleurs détachés, ne remplissent pas les critères légaux.
Les employeurs se félicitent de l’aboutissement de ces négociations quadripartites. Ils se montrent en revanche sceptiques à l’égard de la proposition du Conseil fédéral de mieux protéger les représentants élus des salariés contre le licenciement. Une telle mesure a-t-elle sa place dans le dispositif de protection des salaires des travailleurs détachés?
Bien qu’on ne connaisse pas encore dans le détail les quatorze mesures, des voix s’élèvent déjà pour dénoncer une atteinte à la flexibilité de notre marché du travail. Or, il n’en est rien. La plupart des propositions n’impliquent aucune modification légale et ciblent les entreprises de détachement provenant de l’UE actives dans le secteur de la construction.
Reposant sur le principe du «salaire égal pour un travail égal au même endroit», ce plan d’action contre la sous-enchère salariale contribue également à assurer le maintien de conditions de concurrence équitables sur le marché du travail, fondement du libéralisme économique.
Ce compromis dans le dossier ô combien controversé de la protection des salaires s’appuie sur l’entente retrouvée entre les partenaires sociaux. Succès éphémère ou percée décisive pour faire aboutir les Bilatérales III? La procédure de consultation concernant ce paquet de mesures, qui se déroulera dans le courant de l’été, devrait apporter des premiers éléments de réponse.