Avant l’été, le peuple a plébiscité la loi pour l’électricité. Il a ainsi permis de fixer les grandes lignes pour un approvisionnement en électricité sûr reposant sur des énergies renouvelables. Dans la lignée de la stratégie énergétique et climatique de la Suisse, cette loi fournit enfin une perspective temporelle raisonnable pour le développement des énergies renouvelables et donc une sécurité en termes d’investissements.
Voilà maintenant que le Conseil fédéral veut expérimenter sur le dos du réseau électrique, parent déjà pauvre de la transition énergétique. A peine la loi pour l’électricité sous toit, il a proposé de modifier le calcul des intérêts dus sur le capital investi dans les infrastructures électriques. Indigeste et technique de prime abord, ce sujet est cependant d’une importance considérable. Il ne s’agit pas moins de l’un des piliers centraux du financement de nos infrastructures énergétiques. Car si l’on joue sur ses paramètres, les changements pourraient entraîner des conséquences imprévisibles sur l’ensemble de la mécanique des investissements dans l’approvisionnement en énergie.
La Confédération estime le besoin d’investissement dans le système énergétique à 1600 milliards de francs (Perspectives Energétiques 2050 +et étude sur le réseau de distribution de l’Office fédéral de l’énergie). Pour rendre ce montant colossal disponible, les bailleurs de fonds ont besoin de garanties. Sinon, leurs capitaux migreront vers d’autres secteurs ou quitteront même le pays.
Pour les investissements dans les énergies renouvelables et le réseau, il est donc essentiel que le capital produise des intérêts de manière stable et équitable. C’est particulièrement important pour les installations hydroélectriques et les réseaux, avec un horizon d’investissement jusqu’à 60 ans.
Les modifications du cadre réglementaire sans nécessité se traduisent finalement par un surcoût pour la société
Michael Frank
Monopole naturel, le réseau s’est vu fixer par l’Etat un taux d’intérêt (WACC, Weighted Average Cost of Capital). La méthode du WACC existante garantit la clarté, l’actualité et la stabilité nécessaires: le WACC est calculé chaque année sur la base de la méthode prescrite (clarté); il évolue en fonction des taux d’intérêt sur le marché des capitaux (actualité), il diminue en cas de baisse des taux et augmente en cas de hausse; les principes de calcul définis dans la méthode garantissent des conditions durables d’investissement et de financement (stabilité).
Cette méthode a fait ses preuves depuis des années. Le WACC pour le réseau et celui pour l’encouragement des énergies renouvelables étant étroitement liés, ce changement entraînerait de grandes incertitudes aussi pour le développement des énergies renouvelables. Et tout ce remue-ménage politique, sans générer un seul kilowattheure d’électricité supplémentaire.
Il n’y a aucune raison économique de s’écarter de la méthode du WACC. Le moment n’est donc pas aux expériences. Il faut s’opposer fermement à l’adaptation de la méthode actuelle. Car les modifications du cadre réglementaire sans nécessité se traduisent finalement par un surcoût pour la société.