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13e rente AVS: qui paie quoi?

La ressource de s’endetter et de faire payer aux enfants l’aveuglement de leurs parents pourrait bien s’imposer. Par Jacques Neirynck

«Après que le peuple eut voté dans l’enthousiasme le 13e mois de l’AVS, ce même peuple découvre qu’il devra le payer.»
KEYSTONE
«Après que le peuple eut voté dans l’enthousiasme le 13e mois de l’AVS, ce même peuple découvre qu’il devra le payer.»
Jacques Neirynck
Ancien conseiller national
08 avril 2024, 15h00
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Un proverbe américain énonce cette évidence trop souvent oubliée: «Il n’y a pas de repas gratuit.» A savoir qu’il y a toujours quelqu’un qui l’a payé, même et surtout si ce n’est pas celui qui l’a consommé. Ainsi en est-il des largesses des pouvoirs publics. Les parents ne doivent rien débourser manifestement pour un enfant à l’école (publique), mais ils ont tout de même payé par leurs impôts et par les taxes. L’automobiliste ne roule pas gratuitement sur une route qu’il a contribué à payer de la même manière.

Après que le peuple eut voté dans l’enthousiasme le 13e mois de l’AVS, ce même peuple découvre dans la stupéfaction, voire dans l’indignation de certains, qu’il devra le payer: il ne fera rien que de recevoir en retour l’argent qu’il a versé. Il n’y a pas création de richesse mais circulation de celle-ci. Le problème encore une fois est de savoir qui va payer même si en l’occurrence tout le monde finira par toucher.

80% de la population croit, dur comme fer, que ce pactole surgira du néant

Jacques Neirynck

Le Conseil fédéral propose deux variantes. La première consiste à augmenter les cotisations sociales de 0,8% (la moitié à la charge de l’employé, l’autre devant être payée par son employeur). La seconde combine une hausse des cotisations salariales (+0,5%) et de la TVA (+0,4%) Dans les deux cas il n’y a, lors d’un sondage, que 20% d’avis favorables. Ce qui signifie que 80% de la population croit, dur comme fer, que ce pactole surgira du néant. Il y a certainement une couche qui suppose que le pouvoir a le privilège d’imprimer des billets de banque et que cela enrichit tout le monde.

Que faire? Au monde politique de tricoter la moins douloureuse pour le porte-monnaie. Mais celui de qui? La première variante est dans la logique de l’AVS, pension par répartition: la caisse redistribue sous forme de pensions les cotisations versées chaque année par les actifs. Or, on a déjà triché avec cette règle: les taxes des maisons de jeux et du tabac entrent dans le budget de l’AVS, qui sort de sa logique initiale pour prendre le chemin de la charité subventionnée par le vice. Mais renchérir le coût salarial n’est pas sans inconvénients pour les entreprises, soumises à la concurrence internationale.

Dès lors on peut poursuivre dans la voie de la triche. La seconde variante est plus astucieuse. Augmenter la TVA fait reposer la charge sur tous les consommateurs, y compris les retraités auxquels on enlève d’une main ce que l’on feint de donner de l’autre. Ce n’est pas non plus sans inconvénient dans un pays où le coût de la vie est déjà élevé au point de susciter un important tourisme d’achat dans les pays voisins.

Il n’y a donc pas de solution évidente même parmi celles que l’on pourrait imaginer en plus. «Pas besoin de taxation, il y a bien assez d’argent: il faut aller le chercher dans tout le gaspillage», proclame un internaute. On vient de supprimer l’accès «gratuit» des conseillers fédéraux aux remontées mécaniques, un gaspillage scandaleux. Mais que faire avec l’armée, la transition climatique, l’AI, les routes, les chemins de fer qui sont tous en manque. Il ne reste que la ressource de s’endetter et de faire payer aux enfants l’aveuglement de leurs parents. En sortant l’armée du budget ordinaire, on en prendrait le chemin.