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Une pause estivale ne fait pas le pivot automnal

Les arguments en faveur d’un assouplissement monétaire aux Etats-Unis sont au stade embryonnaire.

En conférence de presse, Jerome Powell a laissé entendre que les conditions monétaires étaient suffisamment restrictives pour favoriser un reflux de l’inflation. Cependant, le patron de la Fed n’exclut pas complètement la possibilité d’un relèvement ultérieur des taux d’intérêt.
KEYSTONE
En conférence de presse, Jerome Powell a laissé entendre que les conditions monétaires étaient suffisamment restrictives pour favoriser un reflux de l’inflation. Cependant, le patron de la Fed n’exclut pas complètement la possibilité d’un relèvement ultérieur des taux d’intérêt.
François Christen
One Swiss Bank à Genève
09 mai 2023, 20h00
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Le gargantuesque menu de la semaine passée s’est révélé assez digeste et dénué de surprise. Tant la Réserve fédérale américaine (Fed) que la Banque centrale européenne (BCE) ont délivré ce qui était attendu, ni plus ni moins, en relevant leurs taux d’intérêt directeurs respectifs d’un quart de pourcentage. Aux Etats-Unis, le communiqué du FOMC laisse clairement entrevoir une pause, car il n’intègre pas de signal explicite annonçant un resserrement accru.

En conférence de presse, Jerome Powell a laissé entendre que les conditions monétaires étaient suffisamment restrictives pour favoriser un reflux de l’inflation. Cependant, le patron de la Fed n’exclut pas complètement la possibilité d’un relèvement ultérieur des taux d’intérêt. La trajectoire de la politique monétaire dépendra d’un large éventail d’informations incluant les conditions sur le marché du travail, les pressions inflationnistes, les anticipations d’inflation ainsi que les développements financiers et internationaux.

Une pause estivale ne fait pas le pivot automnal

Le rapport de l’emploi publié vendredi fait état de la création de 256.000 postes en avril et d’un repli du taux de chômage à 3,4%, un niveau entrevu en janvier et qui s’établit au plus bas depuis 50 ans. Le salaire horaire moyen affiche une progression assez vive, chiffrée à 0,5% sur un mois et 4,4% en glissement annuel. L’étonnante fermeté du marché du travail entretient l’espoir d’un «atterrissage en douceur» de l’économie américaine, mais elle est incompatible avec le «pivot» préfiguré par la courbe des rendements et déjà célébré par Wall Street. Bien que timide, le rebond de l’indice ISM consacré aux services ne plaide pas davantage pour un revirement de la Fed.

Le changement de cap de la banque centrale pourrait toutefois résulter d’une nouvelle phase d’instabilité frappant le système bancaire et financier. Après la chute de SVB, Signature Bank, puis First Republic Bank (absorbée par JP Morgan), d’autres dominos chancellent, à l’image de PacWest Bancorp. Même si les autorités parviennent à endiguer la crise des banques régionales, les retraits massifs pourraient entraver l’accès au crédit des ménages et des entreprises confrontés à des taux d’intérêt plus élevés et des critères d’octroi plus stricts.

Marquée par l’instabilité persistante du système bancaire, mais aussi quelques nouvelles plus réjouissantes (tels les bons résultats d’Apple), la semaine passée s’est soldée par un déclin des rendements en dollars, notamment sur les échéances courtes et intermédiaires, ainsi qu’un creusement modéré des primes de risque de crédit.

En Europe, la BCE a aussi relevé ses taux d’intérêt directeurs de 0,25 point, conformément aux attentes. Le communiqué et les déclarations de Christine Lagarde laissent entrevoir un relèvement accru des taux d’intérêt, mais le ton est moins affirmatif qu’on aurait pu le craindre après la publication de chiffres d’inflation qui restent problématiques (0,7% mensuel, 7,0% en glissement annuel en avril; respectivement 1% et 5,6% hors énergie et alimentation) dans un environnement propice aux augmentations de salaires. Le taux de chômage de la zone euro est en effet tombé à 6,5% en mars, un niveau sans précédent.

Si les «faucons» de la BCE n’ont pas imposé leur vision jeudi passé, ils n’ont pas capitulé comme en témoignent les déclarations du gouverneur Klass Knot, qui a évoqué la possibilité d’un taux de dépôt relevé jusqu’à 5% si l’inflation devait se révéler persistante. Le resserrement des conditions d’accès au crédit mis en lumière par la dernière enquête trimestrielle de la BCE devrait toutefois inciter les gouverneurs à faire preuve de retenue et de patience.