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Une désinversion de mauvais augure?

Le déclin du rendement à 2 ans en dessous du rendement à 10 ans a précédé deux crises majeures.

Une baisse de 0,25 point de pourcentage du taux des Fed Funds, vers une fourchette comprise entre 5% et 5,25%, semble très probable malgré les turbulences qui agitent Wall Street.
Keystone
Une baisse de 0,25 point de pourcentage du taux des Fed Funds, vers une fourchette comprise entre 5% et 5,25%, semble très probable malgré les turbulences qui agitent Wall Street.
François Christen
One Swiss Bank à Genève
10 septembre 2024, 18h30
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Renouvelant un schéma saisonnier souvent observé, les actions ont entamé le mois de septembre sur un repli assez sévère alors que les obligations gouvernementales engrangent des gains significatifs. Scruté de toutes parts, le rapport de l’emploi publié vendredi passé aux Etats-Unis permet de cerner un peu mieux l’état de santé de l’économie américaine. Conformément aux attentes, le taux de chômage a reflué à 4,2% en août après avoir atteint 4,3% en juillet. L’enquête réalisée auprès des entreprises fait par ailleurs état d’un redressement de l’embauche à hauteur de 142.000 postes (contre 89.000 le mois précédent, un chiffre révisé à la baisse).

Le nombre agrégé des heures de travail s’est redressé de 0,3%, effaçant le recul observé en juillet. La progression du revenu horaire moyen, en hausse de 0,4% sur un mois et de 3,8% sur douze mois, implique une augmentation du pouvoir d’achat des ménages. La situation est donc loin d’être dramatique en dépit du refroidissement évident observé depuis plusieurs mois. A ce jour, le relâchement du marché du travail reste compatible avec un scénario d’atterrissage en douceur. Une récession n’est pas inéluctable. Les dernières enquêtes de l’ISM ne traduisent pas de grande rupture: tant l’indice consacré au secteur manufacturier que la jauge des services affichent un timide redressement en août.

Les indicateurs récents n’invitent pas la Réserve fédérale (Fed) à se précipiter, mais deux gouverneurs, Christopher Waller et John Williams, ont confirmé que le moment était venu de réduire les taux d’intérêt. Une baisse de 0,25 point de pourcentage du taux des Fed Funds, vers une fourchette comprise entre 5% et 5,25%, semble très probable malgré les turbulences qui agitent Wall Street. Les banquiers centraux ont toutefois signalé la possibilité d’un cycle d’assouplissement «rapide et énergique» si les développements futurs le justifient. Bien reçu, le message a entraîné une baisse marquée des rendements à court terme, à l’image de celui du T-Note à 2 ans qui a chuté en dessous de 3,7%, au plus bas depuis septembre 2022.

Une désinversion de mauvais augure?

La courbe des rendements en dollars présente désormais une inversion prononcée jusqu’à 2 ans d’échéance et une pente légèrement positive du segment entre 2 à 10 ans (en passant par un minimum à 5 ans). Etroitement liés, les deux phénomènes préfigurent un cycle de baisse des taux d’intérêt agressif qui devrait s’achever en 2026, suivi d’un lent redressement dicté par la reprise de l’activité. Historiquement, la «désinversion» de la courbe entre 2 et 10 ans a précédé des périodes tourmentées, en 2000 et en 2007. La situation actuelle diffère toutefois de celle de 2007, caractérisée par un fort endettement du secteur privé et une fragilité du secteur bancaire débouchant sur une crise du crédit dramatique. L’analogie avec l’éclatement de la «bulle internet» de 2000 semble plus pertinente au regard de l’euphorie, et plus récemment des doutes, suscités par l’intelligence artificielle. Les valorisations actuelles paraissent néanmoins bien plus raisonnables qu’à l’époque de l’émergence d’innombrables sociétés «dot com».

En Europe, les rendements en euros ont fléchi dans la perspective d’une réduction imminente des taux d’intérêt directeurs. Le taux de dépôt sera vraisemblablement abaissé de 3,5% à 3,25% et il est probable que la présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, exprime la volonté d’assouplir davantage la politique monétaire durant le quatrième trimestre et au-delà.

Si les rendements en livres sterling ont aussi reflué, les rendements des emprunts en francs suisses sont restés stables. Plus ferme que prévue au deuxième trimestre, la croissance du PIB helvétique ne justifie pas un relâchement agressif des conditions monétaires, mais le bon comportement de l’inflation devrait inciter la Banque nationale suisse à imiter ses homologues pour contenir le renforcement du franc.