Au terme du premier mois du règne de Donald Trump, de nombreuses questions soulevées par son retour à la Maison-Blanche restent sans réponses, malgré un flux continuel d’annonces et de décrets accueillis avec un certain flegme sur les marchés financiers. Le grand chantier «tarifaire» lancé en grande pompe par une offensive avortée visant le Mexique et le Canada demeure chaotique. Les orientations de la politique fiscale restent très confuses au-delà de l’activisme caricatural du Département pour l’efficacité gouvernementale («Doge») d’Elon Musk.
Les clarifications attendues au sujet des taxes «réciproques» visant les partenaires commerciaux des Etats-Unis ont été différées au 1er avril, mais Donald Trump a évoqué jeudi la possibilité de taxes frappant les importations de voitures, de médicaments et de puces électroniques à hauteur de 25%.
A tort ou à raison, une majorité d’observateurs estiment que les menaces brandies par Donald Trump s’apparentent à une stratégie de négociation qui débouchera sur une solution raisonnable et peu dommageable pour les investisseurs. Cela étant, une issue moins favorable ne peut pas être écartée avec certitude.
Anticipations d’inflation revues à la hausse
Occultée par les développements géopolitiques, l’actualité économique est lié principalement à des sondages qu’il convient d’interpréter avec prudence. Aux Etats-Unis, les premières estimations des PMIs de S&P Global font état d’un léger renforcement de l’activité manufacturière (51,6 en février après 51,2 en janvier), mais surtout d’un repli marqué des activités de services (49,7 après 52,9).
Dans le même registre, l’indice du «sentiment des consommateurs» de l’Université de Michigan a cédé 7 points en février! Cette chute vertigineuse est imputable à la perception des consommateurs démocrates ou indépendants et elle s’accompagne d’une révision à la hausse des anticipations d’inflation: le taux de 3,5% escompté à 5 ans d’horizon s’établit au plus haut depuis 1995.
Bien qu’ils demandent à être confirmés par des données plus concrètes et fiables, les symptômes de faiblesse qui ont émergé aux Etats-Unis ont favorisé un reflux des rendements. Celui du T-Note à 10 ans est retombé en dessous de 4,5% après avoir atteint 4,8% début janvier. Les rendements à court terme intègrent des attentes réalistes, préfigurant des taux monétaires proches de 4% en fin d’année, voire légèrement en dessous, conformément aux signaux émis par Jerome Powell et ses collègues.
En Europe, les données récentes n’indiquent aucune rupture. Les PMIs reflètent une morosité persistante de la conjoncture dans la zone euro. Les élections allemandes, remportées par la droite traditionnelle (CDU/CSU), devraient déboucher sur un gouvernement de coalition avec les sociaux-démocrates et, peut-être, avec les Verts. La capacité de cette coalition à assouplir le contraignant mécanisme de frein à l’endettement qui figure dans la constitution est toutefois incertaine. Sur le marché des capitaux en euros, les rendements affichent un reflux peu significatif, à l’instar de celui du Bund à 10 ans qui a cédé 1 point de base à 2,48%.
Au Royaume-Uni, la persistance de l’inflation salariale, qui a même accéléré pour s’établir à près de 6% en glissement annuel au quatrième trimestre, devrait inciter la Banque d’Angleterre à maintenir un cap prudent en espaçant les réductions de taux d’intérêt. Le rendement du Gilt à 10 ans s’est légèrement redressé pour se rapprocher de 4,6%.
Sur le marché des capitaux en francs suisses, les excès observés à fin 2024 ont été gommés par deux mois de correction qui ont conduit le rendement des emprunts de la Confédération à 10 ans au-dessus de 0,5%. Le scénario d’un retour des taux d’intérêt monétaires en territoire négatif n’a plus les faveurs de la cote et les emprunts en franc suisses ont retrouvé des valorisations raisonnablement attrayantes, du moins à l’aune des standards de la qualité helvétique.