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Un Jerome Powell docile valide l’optimisme ambiant

Le président de la Fed a validé l’espoir d’un «pivot» qui alimente la chute des rendements obligataires. Son collègue new-yorkais John Williams et ses homologues européens se montrent moins conciliants.

Prolongeant la phase d’exubérance amorcée début novembre, Wall Street a célébré les propos amicaux tenus par Jerome Powell lors de la conférence de presse.
Keystone
Prolongeant la phase d’exubérance amorcée début novembre, Wall Street a célébré les propos amicaux tenus par Jerome Powell lors de la conférence de presse.
François Christen
One Swiss Bank à Genève
19 décembre 2023, 19h30
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C’est Noël avant l’heure pour les investisseurs, qui ont décidé de célébrer la baisse des taux d’intérêt qui se profile à l’horizon. Sans surprise, le comité de politique monétaire de la Réserve fédérale (Fed) (FOMC) n’a pas modifié la marge de fluctuation du taux des Fed funds fixée entre 5,25% et 5,5% depuis fin juillet. Le communiqué intègre un léger «biais» vers davantage de rigueur, mais ce point a été complètement ignoré à la faveur des déclarations du président de la Fed, Jerome Powell, et des prévisions économiques dévoilées à l’issue de la réunion.

Le «résumé des projections économiques» fait état d’un reflux de l’inflation plus rapide que précédemment prévu en 2023, malgré une croissance plus robuste. Les perspectives de croissance pour 2024 et 2025 sont quasiment inchangées, mais le FOMC prévoit une désinflation un peu plus rapide. Les observateurs ont toutefois focalisé leur attention sur la prévision du taux des Fed funds qui est attendu à 4,6% à fin 2024 (5,1% précédemment), 3,9% à fin 2025 et 2,5% à long terme si l’on se réfère à la médiane des pronostics. Le graphique «dot plot» traduit cependant des divergences de vues qui s’échelonnent entre un taux inchangé à 5,4% et abaissé à 3,9% l’an prochain!

Prolongeant la phase d’exubérance amorcée début novembre, Wall Street a célébré les propos amicaux tenus par Jerome Powell lors de la conférence de presse. En affirmant qu’un relèvement accru des taux d’intérêt était improbable et en évoquant les risques inhérents à une politique trop longtemps restrictive, le banquier central a validé l’espoir d’un «pivot» qui alimente la chute des rendements obligataires, le rebond des indices boursiers et la baisse des primes de risque sur le marché du crédit.

L’enthousiasme des investisseurs semble néanmoins surfait. Les chiffres d’inflation publiés mardi passé sont satisfaisants, sans plus. Hors énergie et alimentation, l’augmentation des prix à la consommation de 0,3% sur un mois et 4,0% en glissement annuel reste au-dessus de la cible. Supérieure aux attentes, la progression des ventes au détail (0,3% mensuel, 4,1% annuel) suggère que les consommateurs n’ont pas abdiqué et qu’il est hasardeux de parier sur un revirement rapide de la Réserve fédérale. Dans cette logique, le président de la Fed de New York John Williams a tenté, sans grand succès, de refroidir les espoirs attisés par Jerome Powell et les projections dévoilées mercredi dernier. En fin de compte, la semaine se solde par une chute marquée des rendements en dollars. Celui du T-Note à 10 ans est tombé à 3,9% après avoir culminé au-dessus de 5% à fin octobre.

En Europe, la Banque centrale européenne (BCE), la Banque d’Angleterre et la Banque nationale suisse (BNS) ont maintenu le statu quo, conformément aux attentes. A la différence de la Fed, les banques centrales européennes n’ont pas émis de signaux laissant entrevoir un virage rapide. Le conseil des gouverneurs de la BCE n’a «pas du tout discuté de baisses des taux» et les prévisions d’inflation de l’institut ne sont pas compatibles avec l’assouplissement espéré dès le printemps prochain par les investisseurs. Au Royaume-Uni, trois des neuf membres du comité de politique monétaire se sont prononcés en faveur d’un relèvement du taux de base, mais une majorité de six a fait pencher la balance en faveur du statu quo.

La BNS pourrait se montrer conciliante en raison du bon comportement de l’inflation, mais elle ne semble pas pressée d’agir dans un contexte où «l’incertitude reste forte». Les rendements en euros, en livres sterling et en francs ont toutefois poursuivi leur baisse dans le sillage des emprunts en dollars. Excessivement rapide, ce déclin est mal étayé par les développements macroéconomiques récents et la prudence affichée par les autorités monétaires.