La révision partielle de la loi sur les cartels (LCart) en cours suscite de vifs débats. Elle est pourtant essentielle pour rétablir une régulation équilibrée et pragmatique de la concurrence en Suisse. L’économie soutient fermement cette révision, car la pratique actuelle de la Commission de la concurrence (Comco), depuis l’arrêt Gaba de 2016, ne correspond plus à l’esprit de la LCart. Depuis cet arrêt, un accord est souvent considéré comme illicite du fait de sa seule nature, sans même prendre en compte son impact réel sur le marché. Le risque qu’un accord insignifiant (petite part du marché) entre entreprises ou qu’un accord non mis en œuvre soit considéré comme illicite a considérablement augmenté.
Résultat, même des PME dépourvues de pouvoir de marché peuvent se retrouver dans le collimateur des autorités de la concurrence. Une incertitude entoure également le contrôle des abus, car des comportements sont sanctionnés sans que leurs effets sur la concurrence ne soient clairement démontrés. Plusieurs PME confirment malheureusement cette évolution. Cette insécurité juridique freine l’innovation et se révèle, au final, dommageable pour tous.
Revenir à une analyse au cas par cas
Le droit des cartels s’est ainsi éloigné de son esprit d’origine basé notamment sur le sentiment d’injustice ressenti par la concurrence face aux effets négatifs concrets d’un cartel. Les PME se retrouvent ainsi bien souvent dans le viseur des autorités sans en être conscientes car elles n’ont pas les moyens de disposer d’un coûteux département de conformité.
Avant 2016, la Comco devait prouver que les accords avaient des effets néfastes concrets sur le marché et les consommateurs. Une telle approche basée sur des critères qualitatifs et quantitatifs est non seulement plus juste, mais elle permet aussi de cibler les véritables abus de pouvoir de marché sans entraver les pratiques commerciales bénignes ou même bénéfiques.
L’arrêt «Gaba» pose problème
Il est intéressant de noter que le Parlement avait clairement refusé, en 2014, de modifier la loi sur les cartels pour permettre à la Comco de se passer d’une telle analyse. Malgré cela ce changement est devenu une réalité après l’arrêt Gaba du Tribunal fédéral. Cet arrêt a immédiatement suscité de vives critiques et son interprétation continue, huit ans plus tard, à poser de nombreux problèmes aux entreprises.
En adoptant cette révision partielle le Parlement a donc l’occasion de corriger le tir. Cette révision garantirait une régulation de la concurrence plus équitable et fondée sur des preuves. Elle permettrait aux entreprises d’innover et d’avancer sans crainte de sanctions injustifiées, tout en protégeant efficacement aussi bien la concurrence que les consommateurs contre les abus réels.