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Plafonner les primes maladie: un écran de fumée

Aujourd’hui les pouvoirs publics financent environ un tiers des coûts de la santé, demain ce sera davantage. Par Pierre-Gabriel Bieri

«On promet à une partie des assurés de plafonner leurs primes, et comme les coûts restent ce qu’ils sont, on met la différence à la charge de l’Etat… c’est-à-dire des contribuables, selon leur capacité contributive.»
KEYSTONE
«On promet à une partie des assurés de plafonner leurs primes, et comme les coûts restent ce qu’ils sont, on met la différence à la charge de l’Etat… c’est-à-dire des contribuables, selon leur capacité contributive.»
Pierre-Gabriel Bieri
Centre patronal - Secrétaire patronal, politique générale
10 mai 2024, 14h00
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Les primes d’assurance maladie ne cessent d’augmenter, fâchant tous les assurés et atteignant un poids difficilement supportable pour une partie d’entre eux. Ce constat préoccupant suscite de multiples idées visant à freiner la progression des coûts de la santé – puisque c’est bien là l’origine du problème – ou à mieux répartir le financement des soins entre les assurances et les collectivités publiques, comme le prévoit l’utile réforme EFAS. Manque de chance, cette réforme est violemment combattue par une partie de la gauche.

A côté de cela, il y a les propositions démagogiques qui visent à «cacher la poussière sous le tapis», c’est-à-dire à masquer le niveau réel des coûts de la santé et à dissimuler leur évolution, tout en faisant croire aux électeurs qu’on a enfin empoigné le problème. Concrètement, on promet à une partie des assurés de plafonner leurs primes, et comme les coûts restent ce qu’ils sont, on met la différence à la charge de l’Etat, c’est-à-dire des contribuables, selon leur capacité contributive. Le rêve socialiste de faire payer les assurés proportionnellement à leur revenu continue ainsi à se concrétiser pas à pas: aujourd’hui les pouvoirs publics financent environ un tiers des coûts de la santé, demain ce sera davantage.

C’est ce qui se produira si l’initiative populaire «Maximum 10% du revenu pour les primes d’assurance maladie» est acceptée par le peuple et les cantons le 9 juin prochain. En l’état actuel, cette proposition bénéficie d’un engouement populaire facilement acquis: beaucoup d’assurés voient déjà ce qu’ils paieront en moins et beaucoup de contribuables ne distinguent pas encore ce qu’ils paieront en plus – dès lors que tout sera dilué dans la masse globale des impôts.

La population ne sera plus confrontée directement à l’évolution des coûts de la santé et l’incitation à freiner ces coûts disparaîtra

Pierre-Gabriel Bieri

Il n’est certes pas acceptable que des personnes et des familles se ruinent pour financer notre système de santé, indépendamment de l’usage qu’elles en font. Les pouvoirs publics ne restent pourtant pas insensibles à ces situations: les cantons connaissent déjà divers systèmes de subventionnement, et le Canton de Vaud applique déjà – à grands frais! – le plafonnement des primes maladie à 10% du revenu disponible. En septembre passé, le Parlement fédéral a voté un contre-projet destiné à accroître encore les aides cantonales – pour autant que l’initiative socialiste soit rejetée. Ce contre-projet mesuré et différencié, hélas peu mis en valeur dans les débats, pourra-t-il s’imposer face au slogan simpliste de l’initiative?

Si cette dernière sort victorieuse des urnes, on obtiendra une solution beaucoup plus radicale, avec un plafonnement systématique des primes et un report illimité du financement de la santé sur les finances publiques. La population ne sera plus confrontée directement à l’évolution des coûts de la santé et l’incitation à freiner ces coûts disparaîtra. Rien n’aura été entrepris pour s’attaquer aux racines du mal, et celui-ci pourra empirer dans l’indifférence générale. Jusqu’au moment où il deviendra nécessaire de plafonner les dépenses de santé à 10% au maximum du budget de l’Etat, et donc de limiter les prestations?