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Neuchâtel, champion de l’exportation globale, face aux tarifs de Donald Trump

Le canton dispose de plusieurs leviers pour aider les entreprises à amortir le choc de droits de douane américains.

«En cas d’escalade de rétorsions entre l’Amérique, l’Europe et la Chine, le risque de récession globale serait sûrement élevé.»
KEYSTONE
«En cas d’escalade de rétorsions entre l’Amérique, l’Europe et la Chine, le risque de récession globale serait sûrement élevé.»
Florian Németi
Chambre neuchâteloise du commerce et de l'Industrie - Directeur
10 avril 2025, 15h00
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Les exportateurs suisses doivent s’acquitter de 10% de droits de douane pour accéder au marché américain. Les 21 autres pourcents en vigueur quelques heures le 9 avril sont pour l’instant suspendus jusqu’en juillet. Il n’empêche, les entreprises font face à un dilemme: absorber ce surcoût, en détériorant leurs marges ou le reporter sur leurs distributeurs et leurs clients, au risque de voir leurs chiffres d’affaires baisser. Dans les deux cas, sauf revirement de Donald Trump, ces exportateurs seront affaiblis.

De plus, les effets négatifs de la guerre commerciale lancée par les Etats-Unis ne s’arrêtent pas au seul marché américain. En cas d’escalade de rétorsions entre l’Amérique, l’Europe et la Chine, le risque de récession globale serait sûrement élevé. Et le franc s’apprécierait sans doute. Or, pour un pays aussi tributaire du commerce international que la Suisse, l’impact serait sévère.

Et que dire des effets sur le canton de Neuchâtel, figurant parmi les champions suisses de l’exportation, tant vers les États-Unis que vers le reste du monde, en particulier avec ses montres, ses dispositifs médicaux et ses équipements microtechniques! Il en résulterait assurément des pertes d’emplois, mais aussi des risques de délocalisations et une perte d’attractivité pour les investissements étrangers. Surtout, l’importante sous-traitance industrielle locale payerait un lourd tribut aux ajustements à la baisse des prix et des carnets de commandes au sein des chaînes de valeur globales dont elle fait partie.

Cette situation doit alerter dès maintenant les nouvelles autorités cantonales sur la nécessité de renforcer la compétitivité des entreprises durant la législature qui arrive

Florian Németi

Cette situation doit alerter dès maintenant les nouvelles autorités cantonales sur la nécessité de renforcer la compétitivité des entreprises durant la législature qui arrive. Facile à dire! Car, quel genre de mesures réalistes Neuchâtel pourrait-il bien prendre – à son niveau – qui ne soient pas de l’ordre de la (petite) politique industrielle ou du subventionnement direct, dont on sait que ni l’une ni l’autre ne fonctionnent? La réponse tient sans doute à quelques actions ciblées, permettant aux entreprises de compenser quelque peu les difficultés rencontrées sur le plan international, dont les axes suivants:

- Les coûts du travail: ces dernières années, l’économie neuchâteloise a dû passer à la caisse avec des prélèvements salariaux destinés à contribuer à la formation professionnelle, aux structures d’accueil et aux allocations familiales. Cette tendance doit être mise sur «OFF»!

- La nouvelle bureaucratie liée à la durabilité: la gauche du parlement neuchâtelois mijote des taxes et des contraintes administratives supplémentaires, comme l’obligation de présenter des bilans CO2, des plans de mobilité et des rapports de durabilité. Il faut y renoncer;

- La diversification géographique: accompagner les start-up et les PME sur de nouveaux marchés étrangers porteurs pour le savoir-faire industriel et le pôle d’innovation du canton. Par exemple, la Scandinavie, le Canada, mais aussi certains pays du Moyen-Orient présentent des complémentarités et des opportunités d’affaires et d’investissement très intéressantes;

- L’innovation: soutenir l’industrie d’exportation dans la numérisation de ses produits et activités. Avec l’intelligence artificielle, les opportunités sont nombreuses, tout comme les concurrents susceptibles de «tuer» le marché. Neuchâtel est un canton de «micro-hardware»; il doit désormais réussir à lui ajouter une solide couche de valeur ajoutée par le «software».

Bien sûr, ces quelques mesures n’ont pas d’effet immédiat et, quand bien même, elles ne permettraient en aucun cas de compenser 31% de supplément de prix sur le marché. Mais dans le commerce international que l’on voit muter sous nos yeux, nos régions exportatrices ne peuvent pas rester passives. Elles ont quelques cartes« internes »en mains. Il faut les jouer!