La Suisse enregistre depuis des années une importante baisse du nombre de naissances. Alors qu’en 1876, le nombre moyen d’enfants par femme était de 4,36 avec un seuil de remplacement des générations de 3,22, cet indicateur n’a cessé de diminuer (à l’exception du baby-boom de l’après-guerre) pour se situer actuellement à 1,33 avec un seuil de remplacement de 2,08.
Cette diminution drastique de la natalité s’explique par divers facteurs socio-économiques et culturels qui, de manière cumulative, ont profondément transformé la structure démographique de notre pays. L’une des principales causes tient à l’évolution du rôle des enfants dans la société.
Dans la Suisse de 1876, la grande majorité de la population travaillait la terre et les enfants étaient une source essentielle de main-d’œuvre. En l’absence de mécanisation, plus d’enfants dans les fermes signifiait plus de capacités productives et une assurance-vieillesse naturelle. La situation s’est totalement inversée aujourd’hui.
Elever des enfants dans notre société actuelle est un véritable défi financier et de multiples exigences sont imposées aux parents. Selon une étude d’UBS, un couple moyen avec deux enfants est, à l’âge de la retraite, dans une situation inférieure d’un bon million de francs à celle du couple équivalent sans enfants. Ce chiffre considère les coûts directs estimés à environ 20.000 francs par enfant et par année, ainsi que les coûts indirects en lien avec la perte de revenu considérable pour des parents qui réduisent leur activité professionnelle ou manquent des occasions de carrière.
Autrefois, il fallait se décider consciemment à ne pas avoir d’enfants. Aujourd’hui, on décide plutôt consciemment d’avoir un enfant
Luc Oesch
Autrefois, il fallait se décider consciemment à ne pas avoir d’enfants. Aujourd’hui, on décide plutôt consciemment d’avoir un enfant. La baisse de la natalité reflète les sacrifices imposés aux parents, dans une société qui a collectivisé les bénéfices économiques du renouvellement de la population. Dans une moindre mesure seulement, la diffusion des méthodes contraceptives permet aux couples de planifier plus rigoureusement la taille de leur famille.
La diminution des naissances en Suisse pose des défis très importants notamment en matière de prévoyance. Nous devons sensibiliser la population aux enjeux démographiques et promouvoir une culture de la solidarité intergénérationnelle. En valorisant le rôle des jeunes et des aînés dans la société, il est possible de créer un système de prévoyance plus résilient et durable.
Notre système politique et nos législations devraient être les plus équitables possible sans inciter à faire des enfants ni encourager à ne pas en avoir; elles doivent avoir pour objectif final de soutenir l’épanouissement de chacun, aussi sur le plan professionnel. La fiscalité des personnes physiques doit par exemple être réduite massivement dans certains cantons (Vaud notamment), en particulier pour ne pas pénaliser les doubles revenus des familles. Les solutions en matière de garde d’enfants doivent encore être développées, par des réseaux de crèches privées notamment. Les interventions étatiques en la matière ont souvent des bilans pour le moins douteux dans le sens où elles sont chères, peu efficaces et souvent contre-productives.