En 2025, la LPP fête son jubilé d’émeraude puisque la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité est entrée en vigueur en 1985. Les personnes âgées alors de 25 ans arrivent donc à l’âge de référence de la retraite cette année et sont les premières à bénéficier de prestations complètes selon les minima légaux. L’année 2025 marque donc la fin de la montée en régime du deuxième pilier obligatoire.
Le monde en 1985 était quand même un peu différent de celui d’aujourd’hui. Pour l’anecdote, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) orthographiait alors «Patronat» en lui octroyant une majuscule dans son étude économique de 1985 consacrée à la Suisse. Cette publication louait d’ailleurs le rôle du partenariat social pour la détermination des salaires. Elle recommandait une «amélioration de l’appareil statistique suisse» pour améliorer les processus décisionnels. Le budget annuel de la Confédération s’élevait à quelque 22 milliards de francs (86,4 en 2025) et les dépenses totales de l’AVS avaient franchi la barre des 14 milliards (52,5 en 2025).
Certaines évolutions constatées au cours des quatre décennies sont bien connues. Par exemple, la réduction massive de la pauvreté parmi les personnes âgées. Elle touchait environ une personne sur deux au début des années 1980 et concerne aujourd’hui moins d’une sur sept. Par ailleurs, la progression de l’espérance de vie est tout simplement phénoménale. Pour les hommes, l’espérance de vie à 65 ans est passée de 14 ans à plus de 20 ans, dont une quinzaine d’années en bonne santé.
Le niveau réjouissant des prestations participe à l’essor de la «silver economy» et permet à l’actuelle génération de rentiers de bénéficier d’un niveau de vie élevé.
Brenda Duruz-McEvoy
D’autres évolutions sont plus surprenantes. Qui aurait pu prévoir qu’il resterait moins de 1400 caisses de pensions en 2025? On en dénombrait encore plus de 17.000 selon l’édition 1978 de la Statistique des caisses de pensions, dont 3000 fonds patronaux. Un rappel, s’il en faut, que les entreprises étaient nombreuses à ne pas avoir attendu l’obligation légale pour mettre en place un système de prévoyance professionnelle pour les collaborateurs et leur famille.
L’atteinte de la vitesse de croisière de la prévoyance professionnelle obligatoire touche donc au but, mais le voyage ne fait que commencer. La robustesse du deuxième pilier n’est plus à démontrer, comme en témoigne le recours limité au Fonds de garantie et la sécurité dont bénéficient les droits acquis. Le niveau réjouissant des prestations participe à l’essor de la «silver economy» et permet à l’actuelle génération de rentiers de bénéficier d’un niveau de vie élevé, pendant une durée de retraite prolongée. Même la RTS s’empare de ce sujet, pour célébrer la disponibilité simultanée de temps et d’argent pour nos seniors, rebaptisés «seenagers».
Le plus grand défi pour les 40 prochaines années n’est donc pas à chercher dans la mécanique et les rouages rodés de la prévoyance professionnelle, mais dans son rayonnement au-delà du cercle des initiés. Les assurés détiennent souvent la plus grande partie de leur fortune dans leur caisse de pensions, et pourtant c’est la part la plus méconnue. La confiance et la fierté dans notre système méritent d’être soigneusement cultivées.