• Vanguard
  • Changenligne
  • FMP
  • Rent Swiss
  • Gaël Saillen
S'abonner
Publicité

Exigeons la transparence sur la reprise dynamique des textes de l’UE!

Le Conseil fédéral assure que seulement 150 actes juridiques européens devront être repris. Mais c’est une illusion, selon un membre de l’initiative Boussole.

«La Cour de justice de l’Union européenne conserve le droit de déclarer rétroactivement certains actes juridiques des Vingts-Sept comme valables pour la Suisse.»
CJUE
«La Cour de justice de l’Union européenne conserve le droit de déclarer rétroactivement certains actes juridiques des Vingts-Sept comme valables pour la Suisse.»
Marcel Erni
Initiative Boussole - Membre du comité de pilotage
20 novembre 2024, 15h00
Partager

Dans son dernier état des lieux, le Conseil fédéral a précisé que la Suisse devrait reprendre 150 actes juridiques de l’Union européenne (UE) à caractère législatif dans le cadre de l’accord-cadre. Ce chiffre peut sembler raisonnable en comparaison des environ 8000 actes législatifs déjà en vigueur au sein des Vingt-Sept, couvrant les cinq dossiers concernés ainsi que les deux nouveaux dossiers relatifs au marché intérieur. Mais ce chiffre à lui seul ne dit rien sur les véritables conséquences de l’accord: la clarté et la transparence manquent à cet égard.

Il y a trois semaines, on parlait encore de 39 adaptations législatives. Maintenant, il y en a soudainement 150 – une augmentation drastique qui soulève des questions. De plus, l’ampleur réelle de cette décision reste floue:

Les 150 actes législatifs. Oui, ces directives et ordonnances devront dans un premier temps être reprises intégralement et sans discussion dès que l’accord sera accepté par le peuple et les cantons (!). Mais ce n’est que la pointe de l’iceberg. Un acte juridique à caractère législatif peut contenir à lui seul des centaines de nouveaux règlements, directives, décisions, recommandations et avis (article 288 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne).

Adaptations nationales. Plus de 100 personnes au sein de l’administration fédérale sont déjà occupées à adapter notre droit national aux 150 actes de l’UE. Ces adaptations concernent un nombre important de lois et d’ordonnances, montrant ainsi que le chiffre de «150» masque la réalité d’une situation plus complexe.

Reprise dynamique du droit. Une fois l’accord adopté, la reprise dynamique du droit commence. A partir de ce moment, un nombre indéterminé de nouveaux actes législatifs de l’UE pourrait nous être imposé, sans possibilité de blocage. Un flux sans fin de réglementations sur lesquelles nous n’exerçons pratiquement aucune influence.

Influence de la Cour de justice de l’Union européenne. La CJUE conserve en outre le droit de déclarer rétroactivement certains actes juridiques de l’UE comme valables pour la Suisse. Même si cela devait rester rare, de telles décisions pourraient concerner des domaines importants que la CJUE réévalue.

La conclusion est décevante: le chiffre de 150 actes juridiques est une illusion et semble manifestement destiné à rassurer. Il est probable que cette «concession politique» ait été obtenue par l’UE afin de maintenir volontairement ce chiffre à un niveau bas. Les adaptations nationales et le flux ininterrompu de nouvelles directives et règlements qui suivront l’entrée en vigueur du traité sont ainsi passés sous silence.

Mais l’incertitude ne s’arrête pas là. Un point crucial demeure totalement incertain: les conséquences financières de ces 150 actes juridiques et des nombreuses adaptations qu’ils impliquent pour l’économie suisse. Un exemple dissuasif des charges financières est la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), traitée par le Conseil fédéral le 26 juin et dont le contenu a été repris «volontairement» dans une large mesure. Selon la société de conseil bâloise BSS, considérée comme orientée à gauche et donc «insoupçonnable», cette nouvelle directive européenne entraînera des coûts annuels consécutifs de plus de 900 millions de francs, rien que pour 3500 entreprises suisses.

Il est donc d’autant plus important d’exiger la transparence sur le contenu: quels actes juridiques de l’UE doivent être concrètement repris? Et quels règlements nationaux sont concernés? L’adaptation de la législation est-elle bénéfique ou ne fait-elle que créer des charges et des coûts pour les entreprises?

Quels secteurs et combien d’entreprises suisses seront concernés? Ces entreprises seront-elles confrontées à de nouvelles exigences ou ces actes juridiques leur offriront-ils éventuellement de nouvelles opportunités commerciales?

Sans réponses claires à ces questions centrales, l’évaluation de l’accord reste spéculative. Ce manque de transparence rend non seulement difficile l’évaluation des effets à long terme, mais inquiète également les entreprises et la population.