Les obligations font pâle figure au regard de l’excellente performance des actions qui a permis aux indices Dow Jones, S&P 500 et Nasdaq d’établir de nouveaux records historiques. Les emprunts du Trésor US ont toutefois généré des gains modestes, bien que le rendement du « T-Note » à dix ans soit inchangé à 0,85%. Dans le sillage des actions, les emprunts d’entreprises ont bénéficié d’une décrue marquée des primes de risque en novembre, notamment sur le segment plus spéculatif des obligations « high yield ».
L’optimisme des investisseurs peut paraître excessif, mais il doit beaucoup à l’espoir d’une résolution de la crise sanitaire rendue possible par l’arrivée de plusieurs vaccins prometteurs. L’issue des élections américaines a aussi joué un rôle favorable. Le penchant des Démocrates pour la réglementation et les taxes visant les entreprises et les contribuables aisés devrait être bridé par le partage des forces parlementaires entre un Sénat républicain (sous réserve d’une improbable double rocade en Géorgie) et d’une Chambre des Représentants démocrate. En outre, Joe Biden ne devrait pas conduire une politique franchement hostile aux intérêts de l’industrie qui devra toutefois composer avec une politique climatique et des mesures environnementales plus contraignantes.
Une dégradation du marché du travail
Toujours dans le registre politique, la désignation de Janet Yellen au poste de Secrétaire du Trésor n’est pas pour déplaire à Wall Street. L’économiste, qui a présidé la Réserve Fédérale avant Jerome Powell, devrait travailler en bonne entente avec la banque centrale. Ce choix suggère que l’annonce de Steve Mnuchin qui remettait en question l’extension de plusieurs programmes instaurés par la Fed le printemps passé restera sans effets. Les marchés financiers continueront probablement à bénéficier des largesses de Jerome Powell et de ses collègues du FOMC qui ont majoritairement adopté une vision pragmatique et symétrique à l’égard des risques d’inflation.
Il est toutefois difficile de réconcilier les nouvelles économiques récentes et la situation sanitaire actuelle avec l’enthousiasme qui s’exprime sur les marchés financiers. Plusieurs indicateurs récents mettent en lumière une dégradation de la confiance des consommateurs (indice du Conférence Board en recul de 101,4 en octobre à 96,1 en novembre; indice de l’Université de Michigan aussi en baisse de près 5 points à 76,9). Le redressement des demandes d’indemnités de chômage traduit aussi une dégradation du marché du travail en lien avec le rebond des cas de Covid-19 qui a entrainé de nouvelles contraintes dans plusieurs régions. Sans surprise, les ventes du «Black Friday» réalisées dans les surfaces commerciales ont chuté par rapport à l’an passé, tandis que les ventes «en ligne» affichent une progression robuste, mais pas affolante (de l’ordre de 22 %). Les indicateurs attendus cette semaine (ISM et rapport de l’emploi) permettront de mieux cerner l’état de la conjoncture aux USA et l’impact du rebond des cas de Covid-19 dans l’attente de vaccins qui pourraient être diffusés avant la fin de l’année.
La «deuxième vague»
En Europe, les emprunts gouvernementaux présentent des rendements stables: celui du Bund allemand à dix ans est inchangé à -0,58%. Tombé à 0,60%, le rendement du BTP italien a établi un nouveau record de profondeur. La pression qui s’exerce sur les taux d’intérêt en euros est alimentée par l’évidence d’une rechute de l’activité en lien avec la «deuxième vague» de Covid-19 qui frappe l’Europe depuis plusieurs semaines.
Sans surprise, la plupart des enquêtes mettent en lumière une dégradation de la confiance des consommateurs et du climat des affaires. L’indice composite du sentiment économique publié de la Commission Européenne s’est replié de 91,1 en octobre à 87,6 en novembre, après s’être redressé durant six mois. L’indice reste toutefois loin du niveau de 64 entrevu en avril, à l’occasion du confinement très strict imposé dans la plupart des pays européens. Le reflux évident du nombre de contaminations a conduit certains gouvernements à esquisser un assouplissement graduel des contraintes qui permet d’espérer un rebond de la croissance dès le premier trimestre 2021.
Hors zone euro, le rendement du «Gilt» britannique à dix ans est tombé à 0,29% alors que les négociations commerciales avec l’UE n’ont toujours pas abouti à un mois de la sortie de l’union douanière. En Suisse, l’indicateur avancé du KOF a fléchi pour le deuxième mois consécutif en novembre (103,5 après 106,3 en octobre) et annonce des perspectives moroses, mais pas alarmantes, qui devraient conforter la BNS dans son immobilisme. Les taux d’intérêt en francs suisses sont pratiquement inchangés au terme de la semaine écoulée.
Au rang des bonnes nouvelles, les derniers PMI chinois confirment le rétablissement de la première économie frappée par le Covid-19. En novembre, la marche des affaires s’est renforcée aussi bien pour le secteur manufacturier (52,1 après 51,4) que pour les entreprises de services (56,4 après 56,2). La surperformance des actions chinoises observée en 2020 est donc bien étayée par les développements sanitaires, économiques et politiques.