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Pour la Fed, priorité à la lutte contre l’inflation

La Réserve fédérale s’apprête à orchestrer un redressement périlleux des taux d’intérêt réels.

François Christen
One Swiss Bank à Genève
19 janvier 2022, 7h04
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Enthousiaste un jour, déprimé le lendemain, le contexte financier est de plus en plus tourmenté. Une accalmie précaire sur le marché obligataire a permis à Wall Street de reprendre pied avant l’arrivée d’une nouvelle perturbation exacerbée par les perspectives de resserrement monétaire qui se profilent à l’horizon. Sans surprise, Jerome Powell et Lael Brainard ont confirmé le changement de cap de la banque centrale à l’occasion de leurs auditions respectives face à la commission bancaire du Sénat. 

Pas de plan de route précis 

Bien que le «Chair» Powell ait partiellement désamorcé les craintes d’une réduction rapide de la taille du bilan de la Réserve Fédérale, la future «Vice-Chair» Brainard estime que la réduction de l’inflation constitue désormais l’objectif prioritaire. Le rétablissement rapide du marché du travail, avec un taux de chômage tombé à 3,9% en décembre, a changé les données du problème. Soucieux de conserver une certaine marge de manoeuvre, Powell et Brainard n’ont pas dévoilé un plan de route précis, mais le président de la Fed de Saint Louis James Bullard a confirmé la vraisemblance d’un scénario impliquant quatre relèvements du taux d’intérêt directeur en 2022, en débutant le cycle en mars. Un signal dans ce sens pourrait donc être émis lors de la réunion du FOMC qui se tiendra les 25 et 26 janvier. 

Pour la Fed, priorité à la lutte contre l’inflation

Conformes aux attentes, les indicateurs d’inflation publiés la semaine passée ont reçu un accueil placide. La progression des prix à la consommation a pourtant atteint 7% en glissement annuel en décembre, un rythme qui n’avait plus été atteint depuis 1982! Hors énergie et alimentation, le renchérissement atteint 0,6% sur un mois et 5,5% en glissement annuel, mettant en lumière une dynamique inflationniste qui va au-delà des tensions temporaires imputable aux variations de prix des matières premières. Le recul des ventes au détail en décembre (-1,9% mensuel, 16,9% en glissement annuel) met en lumière un tassement de la demande des ménages corroboré par le déclin de la confiance des consommateurs (68,8 après 70,6 selon l’enquête de l’Université du Michigan). 

Des performances négatives pour les obligations? 

Sur le marché obligataire, la courbe des rendements en dollars s’est légèrement aplatie dans la perspective d’un relèvement plus rapide des taux d’intérêt monétaires. Le rendement du T-Note à 2 ans est proche de 1%, alors que celui du T-Note à 10 ans s’est stabilisé aux environs de 1,8%. Ces niveaux sont encore loin de justifier un exode massif des actions vers les obligations. Les taux d’intérêts réels sont encore amplement négatifs, incitant les épargnants à surpondérer les actifs risqués. Le changement de cap annoncé par la Fed et la persistance de l’inflation aux États-Unis devraient conduire à un redressement accru des taux d’intérêt impliquant des performances négatives pour les obligations et des turbulences sur les actions, notamment pour les titres de «croissance». 

Accalmie précaire sur le marché euopéen 

En Europe, le marché des capitaux est le théâtre d’une accalmie précaire, sous l’influence des États-Unis. Le rendement du Bund allemand à 10 ans s’établit juste en-dessous de 0%, au plus haut depuis le printemps 2019. Les primes de risque infligées à l’Italie ont légèrement fléchi en dépit de la réduction des achats d’actifs qui devrait passer de 80 à 20 milliards d’euros par mois au cours de l’année 2022. La prolixe Présidente Christine Lagarde prévoit un reflux graduel de l’inflation au cours des prochains mois, un scénario plus crédible qu’aux États-Unis en raison du relâchement du marché du travail et de l’inertie des salaires en Europe. Le relèvement des taux d’intérêt par la BCE devrait se faire attendre au moins jusqu’en 2023. Ce pronostic s’applique aussi à la BNS qui n’est pas confrontée à un dérapage sévère de l’inflation et qui s’efforce de réduire l’attrait du franc suisse.