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L’inflation ou la fin des taux négatifs en Suisse

Une fois le cycle de resserrement entamé, possiblement dès septembre, la BNS adoptera un rythme progressif. Les taux ne devraient entrer en territoire positif qu’en 2023.

Stéphane Monier
CIO Lombard Odier (Banque Privée)
27 mai 2022, 7h30
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Les pressions inflationnistes pourraient offrir une fenêtre d’opportunité à la Suisse. En avril, les prix à la consommation y ont augmenté de 2,5% en rythme annuel, le plus haut niveau depuis 2008. Pour la Banque nationale suisse (BNS), c’est l’occasion d’échapper à sept années de taux directeurs négatifs.

Stimulée par les perturbations des chaînes d’approvisionnement, la stratégie zéro Covid de la Chine et la hausse des prix de l’énergie et des matières premières, l’inflation incite les banques centrales à resserrer leurs politiques monétaires. La Réserve fédérale américaine a déjà entamé son cycle de hausse des taux et la Banque centrale européenne (BCE) devrait lui emboîter le pas dès juillet.

La hausse des taux d’intérêt dans la zone euro creusera l’écart avec les coûts d’emprunt en Suisse. Dès lors, la BNS ne devra plus maintenir les taux bas pour dissuader les investisseurs de détenir des francs suisses. Depuis l’abandon du cours plancher en janvier 2015, le franc s’est apprécié face à l’euro. Le conflit en Ukraine n’a fait qu’accentuer les pressions haussières en 2022. Si l’évolution du franc suisse était historiquement liée au différentiel de taux avec la zone euro, la paire EUR/CHF devrait passer sous la parité au dernier trimestre pour d’autres raisons: la BNS affiche déjà un bilan imposant, les exportations suisses demeurent solides et l’inflation relativement élevée. Nous nous attendons donc à ce que la BNS ralentisse ses interventions sur le marché des changes.

Tant que la BCE n’aura pas commencé à relever ses taux directeurs, la politique monétaire de la BNS continuera donc à reposer sur des taux négatifs et sur la volonté de limiter la force du franc. En effet, la banque centrale ne peut pas préconiser une hausse des coûts d’emprunt sans accroître la pression sur la monnaie.

Vers une croissance de 2,2%

Une fois le cycle de resserrement entamé, possiblement dès septembre, la BNS adoptera un rythme progressif. Les taux ne devraient entrer en territoire positif qu’en 2023, passant du niveau actuel de -0,75% à 0,25% à un horizon de douze mois. Les obligations gouvernementales à 10 ans devraient afficher un rendement de 1% d’ici un an, contre 0,65% aujourd’hui.

L’économie suisse a su résister aux périodes de ralentissement de la conjoncture mondiale de ces dernières décennies, en partie grâce à une solide création d’emplois et à l’immigration nette qui en résulte. Ayant fait preuve de résilience durant la pandémie, la croissance économique de la Suisse devrait atteindre 2,2% en 2022 et 1,2% en 2023, selon nos estimations.

La BNS prévoit une inflation de 2,1% pour 2022 – un renchérissement du coût de la vie bien inférieur aux pays voisins. L’explication réside en partie dans la force du franc suisse, qui agit comme un mécanisme de défense en maintenant les prix des importations bas. 

En outre, la Suisse est moins dépendante des importations d’énergie que ses voisins. L’énergie hydroélectrique représente plus de la moitié de sa capacité totale de production d’électricité et le gaz naturel 15% de la consommation totale d’énergie, dont environ la moitié provient de Russie. Ce qui rend la Suisse moins vulnérable aux perturbations géopolitiques liées à la guerre en Ukraine.