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L’espoir d’un «pivot de la Fed» s’estompe

Le rebond des rendements en dollars invite de nouveau à un rééquilibrage tactique vers la sécurité.

Le président de la Fed Jerome Powell semble aussi en faveur d’une interruption du relèvement des taux d’intérêt afin de mieux cerner les effets des tensions du secteur bancaire.
Keystone
Le président de la Fed Jerome Powell semble aussi en faveur d’une interruption du relèvement des taux d’intérêt afin de mieux cerner les effets des tensions du secteur bancaire.
François Christen
One Swiss Bank à Genève
23 mai 2023, 18h30
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Après plusieurs semaines sans relief, le marché obligataire est finalement sorti de sa torpeur. Aux Etats-Unis, le rendement du T-Note à 10 ans s’est redressé pour s’établir aux environs de 3,7%, après avoir longtemps gravité sur une orbite proche de 3,5%. Des tensions assez vives ont conduit le rendement du T-Note à 2 ans au-dessus de 4,25%. Cette correction intervient dans un contexte plutôt favorable aux actifs risqués, notamment aux actions orientées à la hausse. A juste titre, Wall Street ignore le risque d’un défaut du gouvernement fédéral alors que les politiciens prolongent le suspens du «debt ceiling» avant de nous offrir un dénouement de dernière minute dans la grande tradition hollywoodienne.

Ce régime «risk on» est alimenté par une actualité macroéconomique plutôt rassurante et compatible avec un «atterrissage en douceur» de l’économie américaine. Erratiques, les ventes au détail se sont redressées en avril après avoir fléchi les deux mois précédents. La série expurgée des postes les plus volatils (voitures, carburants, matériaux de construction) montre que les consommateurs n’ont pas abdiqué. La production manufacturière est repartie à la hausse en progressant de 1% en avril, après avoir cédé 0,8% en mars. L’indice NAHB résumant les conditions du marché immobilier a poursuivi son rebond pour s’établir à 50 en mai après être tombé à 31 en décembre passé. Le recul des ventes de maisons existantes et des permis de construire traduisent toutefois une morosité persistante du secteur. En outre, l’indicateur composite du Conference Board annonce toujours une probable récession à 12 mois d’horizon.

Le redressement des rendements est aussi imputable aux déclarations de plusieurs banquiers centraux qui ont mis l’accent sur les risques d’inflation et remis en question la trajectoire du taux d’intérêt directeur de la Réserve fédérale (Fed). Au rang des «faucons», Logan, Jefferson et Bullard ont tous laissé entendre qu’un resserrement monétaire accru pourrait se révéler nécessaire. Plus modéré, Kashkari semble favorable à une pause, mais il se refuse à affirmer que le cycle de relèvement des taux d’intérêt est achevé. Jerome Powell, président de la Fed, semble aussi en faveur d’une interruption afin de mieux cerner les effets des tensions du secteur bancaire. En bref, une pause paraît très probable en juin, mais l’espoir d’un revirement rapide s’estompe.

En Europe, la courbe des rendements en euro est soumise à des tensions modérées. Le rendement du Bund allemand à 10 ans s’est redressé aux environs de 2,4%, au plus haut depuis début mai. Sans surprise, la présidente de la Banque centrale européenne Christine Lagarde et ses collègues continuent à privilégier la lutte contre l’inflation, ce qui devrait nous valoir un nouveau relèvement de 0,25 point de pourcentage des taux d’intérêt directeurs le 15 juin. Les dernières prévisions de la Commission européenne soulignent la solidité d’une économie qui a échappé à une récession qui semblait quasiment inévitable. La baisse salutaire des prix de l’énergie a conduit la Commission à réviser ses projections de croissance de 0,8% à 1% pour 2023, et de 1,6% à 1,7% en 2024.

L’espoir d’un «pivot de la Fed» s’estompe

Echappant à l’influence des Etats-Unis et de l’Europe, les obligations en francs suisses présentent des rendements stables et peu attrayants en termes tactiques. Le comportement assez sage de l’inflation en Suisse confère une marge de manœuvre à la Banque nationale suisse (BNS) même si Thomas Jordan estime qu’un relèvement accru des taux d’intérêt n’est pas exclu. De fait, les conditions monétaires helvétiques demeurent peu restrictives avec des taux d’intérêt «réels» proches de zéro, voire légèrement négatifs.