Le manque de liquidité du marché immobilier suisse, conjugué à une forte demande consécutive à la pandémie de Covid-19, fait grimper les prix des biens résidentiels, tout particulièrement ceux des maisons individuelles. Selon le groupe de services immobiliers Cifi, l'accès à la propriété reste plus que jamais très difficile en Suisse pour les particuliers.
Dans une étude publiée jeudi, l'entreprise zurichoise souligne la situation paradoxale du marché immobilier helvétique, où acheter une maison n'a jamais été aussi cher malgré des taux d'intérêt situés à des planchers historiques depuis plusieurs années. En 2020, les prix pour cette catégorie de bien ont grimpé de 5,8% en moyenne, la croissance la plus forte depuis 2013.
Globalement, une hausse de 5,1% a été constatée l'année dernière pour l'immobilier suisse, une progression jamais enregistrée depuis 2014. Les régions dites périphériques - soit le Jura, les Grisons ou encore les cantons de Suisse centrale - ont visiblement connu des envolées.
Confirmant une tendance maintes fois décrite par des experts immobiliers, l'étude de Cifi affirme que la crise sanitaire a dopé la demande pour des logements plus spacieux, dans une logique d'amélioration de qualité de vie. La construction de nouveaux logements n'a pas suivi, freinée qui plus est par les fermetures de chantiers durant la pandémie.
La location moins avantageuse
Les différences régionales sont importantes, même pour les principales villes du pays. Dans Zurich et sa région, seules 34 maison individuelles étaient en construction au premier semestre 2021, explique le groupe zurichois. Du côté de Genève, l'érection de plus de 1000 biens était dénombrée. Pour le marché dans sa globalité, 484 objets étaient en construction pour l'agglomération zurichoise et 1423 pour celle de Genève.
Le contexte est bien plus détendu pour les biens proposés à la location, avec une offre davantage adaptée à la demande. Cifi rappelle cependant que l'achat reste plus avantageux à long terme. A Zurich, l'entreprise calcule une charge mensuelle de 2165 francs comprenant l'hypothèque, l'entretien et les impôts liés à une propriété de 115 mètres carrés d'une valeur de 1,75 million de francs. Louer un tel bien coûterait 2945 francs par mois, soit 780 francs de plus.
Pour l'immobilier de rendement, les investisseurs privés prennent de plus en plus de risques en raison de performances de plus en plus maigres, une situation sur laquelle la Banque nationale suisse (BNS) attire régulièrement l'attention, rappelle Cifi, qui tient jeudi son congrès "financier et immobilier" annuel. (AWP)
L'immobilier n'a toujours pas atteint son apogée
Rien ne semble pouvoir enrayer la hausse des prix de l'immobilier. Au troisième trimestre, les prix des logements ont augmenté de près de 6% par rapport à l'exercice précédent, "ce qui correspond à la plus forte hausse depuis 2013", écrit jeudi UBS. Etant donné que les revenus des ménages n'augmentent pas au même rythme, les logements en propriété sont devenus de moins en moins abordables.
Paradoxalement, cette hausse des prix ne s'est pas traduite par une hausse de l'indice de bulle immobilière compilé par UBS. Au contraire, celui-ci a nettement diminué, à 1,34 point, contre 1,87 points auparavant, restant malgré tout dans la zone à risque.
La baisse de l'indice s'explique par la "bonne reprise de l'économie au premier semestre 2021 et doit donc être relativisée", précise la banque. En effet, celui-ci devrait à nouveau augmenter au prochain trimestre, attendu à 1,57 points, et les déséquilibres devraient "se creuser encore plus qu'avant la pandémie", de l'avis des économistes.
Par région, les risques fondamentaux (les prix immobiliers sont déconnectés des revenus des ménages et du niveau des loyers) et de surchauffe conjoncturelle (une nette hausse de la demande fait flamber les prix) sont très élevés dans les agglomérations de Zurich, Bâle, Genève et Lausanne. Les risques de liquidités (une offre élevée associée à une faible demande rend les ventes difficiles) persistent dans certaines zones du Valais, du Tessin et du canton de Neuchâtel. (AWP)