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Le déficit mondial en eau va être multiplié par cinq d’ici à 2050

D’après le WEF, la demande va dépasser l’offre de 40% d’ici à 2030 et trois milliards d’individus feront face à des situations de stress hydrique si le monde reste sur la trajectoire actuelle de réchauffement.

Si l’eau recouvre environ 70% de la planète (dont 97% d’eau salée), la disponibilité en eau douce se réduit inexorablement parallèlement à la croissance démographique et au changement climatique.
Si l’eau recouvre environ 70% de la planète (dont 97% d’eau salée), la disponibilité en eau douce se réduit inexorablement parallèlement à la croissance démographique et au changement climatique.
Nicolas Jacob
ODDO BHF AM - Gérant de portefeuille action
23 mars 2023, 20h00
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L’eau est un des besoins humains fondamentaux par excellence. La disponibilité d’eau douce (pour l’agriculture, l’industrie, l’alimentation et la santé) s’avère être une fonction inverse de la croissance démographique, et le déficit s’aggrave sous les effets du changement climatique. D’après le Forum économique mondial (WEF), la demande d’eau va dépasser l’offre de 40% d’ici 2030 et trois milliards d’individus feront face à des situations de stress hydrique si le monde reste sur la trajectoire actuelle de réchauffement (+2,7 à +3,1°C à l’horizon 2100). Deux leviers principaux devraient pouvoir contribuer à atténuer cette crise de l’eau: rationaliser la demande (baisse de la consommation et mesures d’efficacité) et accroître les ressources disponibles (essentiellement par le dessalement).

Smart irrigation et dessalement

Si l’eau recouvre environ 70% de la planète (dont 97% d’eau salée), la disponibilité en eau douce se réduit inexorablement parallèlement à la croissance démographique et au changement climatique. Selon la définition de la Banque mondiale, un pays est en situation de stress hydrique si la disponibilité en eau est inférieure à 1700 mètres cubes par an et par habitant. En Europe et aux Etats-Unis par exemple, ce chiffre est respectivement d’environ 3000 et 8000 mètres cubes par an et par habitant. Si un certain nombre de pays d’Afrique, du Proche et du Moyen-Orient sont déjà touchés depuis longtemps par le stress hydrique, la raréfaction des ressources en eau douce s’étend progressivement dans des zones telles que la côte ouest des Etats-Unis, le bassin méditerranéen, certains pays d’Asie centrale, ou bien encore l’Australie.

L’usage de l’eau dans le monde se répartit entre l’agriculture (70%), l’industrie (22%), et les usages domestiques (8%). La place de l’agriculture, et donc de l’enjeu de l’alimentation, met en perspective la place croissante que la gestion des ressources en eau prend dans la définition des objectifs climatiques de nombreux pays depuis une vingtaine d’années et permet de concentrer les efforts sur deux leviers d’action: rationaliser la demande en eau et accroître les ressources disponibles.

Rationaliser la demande: si l’effort doit être partagé par tous, en particulier pour lutter contre les pertes en réseau, l’agriculture occupe une place centrale sur l’enjeu de la préservation des ressources en eau. Cela doit passer par l’amélioration de l’irrigation grâce aux nouvelles technologies («smart irrigation»), par un recours croissant au recyclage des eaux usées, et par de nouvelles formes d’agricultures moins intensives en eau (les cultures verticales, par exemple).

Accroître les ressources disponibles: le principal levier ici est le développement de capacités de dessalement d’eau de mer. Développé à l’échelle industrielle à partir des années 1970 dans les pays du Proche et Moyen-Orient, c’est aujourd’hui 21.000 usines à travers le monde qui produisent environ 21 milliards de mètres cubes d’eau dessalée par an. Ce secteur connaît une croissance moyenne de 10 à 12% par an depuis le début des années 2000. Le dessalement d’eau est un processus qui émet néanmoins une quantité importante de gaz à effet de serre et provoque des rejets de saumures (trop concentré en sel et minéraux pour tout usage agricole, industriel ou domestique). La technologie la moins émettrice est celle de l’osmose inverse (pression hydraulique et filtration par membrane) rejetant cinq fois moins de CO2 par mètre cube produit que les procédés plus anciens de dessalement thermique (consistant à chauffer l’eau de mer et à récupérer la vapeur d’eau dépourvue de sel).

L’américain Lindsay et le japonais Hitachi Zosen sont deux exemples de sociétés focalisées sur le développement de solutions atténuant la crise de l’eau. Lindsay, capitalisant quelque 1,6 milliard de dollars, est un spécialiste du matériel d’irrigation pour l’agriculture (86% de son chiffre d’affaires) qui développe des solutions de «smart irrigation» (pilotage de l’inclinaison, prévisions des besoins en eau en fonction des conditions atmosphériques, alimentation énergétique par panneaux photovoltaïques). Hitachi Zosen est un spécialiste de la production d’équipements environnementaux capitalisant quelque 1,1 milliard de dollars, présent sur la conception et l’installation d’usines de dessalement (12% de son chiffre d’affaires, 45 usines à ce jour dont la moitié utilisant la technologie d’osmose inverse).