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La crise en Ukraine obscurcit l’horizon économique

Dans leur dernière synthèse trimestrielle, les stratégistes de l’Isag* placent l'envolée des prix de l'énergie au premier rang des préoccupations.

Daniel Varela
Piguet Galland & Cie - Chief Investment Officer
16 mars 2022, 7h00
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C’est dans un contexte géopolitique hautement incertain que s’est tenue la dernière réunion trimestrielle des membres de l’Isag. Exit le Covid-19, c’est désormais la guerre en Ukraine, les sanctions économiques et financières à l’égard de la Russie et leur impact sur les cours des matières premières qui animent les débats du comité. Et c’est plus particulièrement l’envolée des prix de l’énergie qui figure au premier rang des préoccupations. Si l’épisode de pétrole cher perdure, cela ne peut que menacer la reprise en cours de l’économie mondiale. Et la situation peu enviable de l’Europe, notamment en raison de sa dépendance vis-à-vis du pétrole et du gaz naturel russe, semble garantir un sévère coup de frein voire même une récession si la guerre se prolonge durablement. 

Dans leurs prévisions, les membres de l’Isag font pour l’instant l’hypothèse d’un arrêt du conflit d’ici quelques semaines et tablent ainsi sur une poursuite de l’expansion économique sur le Vieux Continent. L’économie américaine semble quant à elle mieux protégée en raison d’une production domestique de pétrole proche de l’auto-suffisance. Mais l’impact de la forte hausse du «gallon» d’essence ne devrait pas tarder à se faire sentir sur la confiance des ménages américains, ceci en dépit d’un marché de l’emploi encore porteur, de hausses de salaires jamais observées depuis des décennies et de l’importante épargne accumulée durant la pandémie. 

A contre-courant de ses homologues occidentales, la banque centrale chinoise semble être la seule à pouvoir faire de la relance

A moins d’un rapide recul des prix de l’énergie, scénario qui semble illusoire alors que les sanctions à l’égard de la Russie semblent appelées à perdurer au-delà d’un éventuel cessez-le-feu, le monde devrait s’installer plus longtemps que prévu dans un environnement d’inflation élevée. D’autant que la tendance à la dé-globalisation et à la relocalisation devrait contribuer à maintenir une pression haussière sur les prix des biens. Certains membres de l’Isag osent donc le mot tant redouté de stagflation, à savoir un contexte marqué par une croissance atone et une inflation élevée qui est en général peu apprécié par les banques centrales. Si le dérapage de l’inflation est observé de manière globale, c’est surtout aux Etats-Unis qu’il inquiète car il s’accompagne de hausses salariales qui peuvent enclencher une spirale négative. La crise ukrainienne ne devrait donc pas dissuader la Réserve fédérale américaine d’entamer le durcissement de sa politique monétaire dès sa prochaine réunion. Tout juste est-il admis que les hausses de taux initiales seront plus mesurées que ce qui était anticipé avant la guerre. Une attitude plus prudente est attendue du côté de la Banque centrale européenne, même si Christine Lagarde a depuis confirmé que le changement de cap monétaire reste d’actualité pour 2022. A contre-courant de ses homologues occidentales, la banque centrale chinoise semble être la seule à pouvoir faire de la relance.

Cette crise et ses conséquences économiques incitent les membres de l’Isag à plus de prudence sur le court et moyen terme. Cela se traduit par un niveau de cash un peu supérieur à la norme et une allocation neutre voire légèrement sous-pondérée sur la part actions. D’ailleurs aucun pari clair ne se dégage en termes de préférence géographique ou de style, tandis que les titres de qualité sont clairement préférés. Si le risque d’une baisse supplémentaire des bourses n’est pas écarté, la plupart des intervenants guette néanmoins une accalmie politique pour pouvoir saisir les opportunités créées par la récente phase de volatilité sur les bourses. Les valorisations boursières sont redevenues partout plus raisonnables dans un contexte de cycle économique qui n’a sans doute pas encore atteint son terme. Les obligations, malmenées par la remontée de l’inflation, restent généralement sous-pondérées dans les portefeuilles à l’exception des emprunts souverains chinois. Par ailleurs, certains mettent en avant les bienfaits associés aux matières premières en termes d’assurance de portefeuille. Dans cette classe d’actifs, l’or est le plus souvent privilégié. Enfin, du côté des monnaies, l’appréciation structurelle du franc suisse ne semble plus faire débat.

La crise en Ukraine obscurcit l’horizon économique