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Inflation: juste un mauvais moment à passer?

La stabilité des taux d’intérêt en dollars corrobore la thèse d’un dérapage transitoire de l’inflation.

François Christen
One Swiss Bank à Genève
17 août 2021, 22h32
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En théorie, inflation et obligations ne font pas bon ménage. Le renchérissement ampute la rémunération réelle des épargnants qui détiennent des titres à revenus fixes. Une accélération de l’inflation implique généralement un redressement des taux d’intérêt à moyen- et long-terme visant à compenser la perte de pouvoir d’achats prévue jusqu’à l’échéance d’un placement obligataire. Ce lien s’est manifesté durant un premier trimestre qui a vu le rendement du T-Note US à dix ans se redresser de 0,9% à 1,75%, mais il s’est ensuite rompu bien que le retour de l’inflation aux Etats-Unis se soit matérialisé.

Les prix à la consommation ont continué à augmenter à un rythme soutenu en juillet, soit 0,5% sur un mois et 5,4% en glissement annuel. Hors énergie et alimentation, l’inflation « sous-jacente » a toutefois légèrement reflué pour s’établir à 0,3% sur un mois et 4,3% en glissement annuel (après 4,5% en juin). Une timide décrue a débuté, mais la progression rapide des prix à la production (1% mensuel et 7,8% en glissement annuel) ne préfigure pas de grande accalmie dans un avenir proche. Les développements récents apportent de l’eau au moulin de ceux qui prophétisent un retour de l’inflation justifiant une réaction de la part de la Fed et une politique fiscale moins stimulante.

Inflation: juste un mauvais moment à passer?

L’inflation divise

L’inflation divise l’opinion. Alarmante et durable pour les uns, acceptable et transitoire pour les autres. Le marché obligataire adhère, pour l’heure, au deuxième camp. Les taux d’intérêt à long terme sont repartis à la baisse, conduisant le rendement du T-Note US à dix ans en-dessous de 1,3%. Cette sérénité est partiellement justifiée par le comportement des coûts salariaux mis en lumière par le rapport sur la productivité et le coût du travail au deuxième trimestre : les compensations horaires affichent une progression annuelle de 2,0%, en phase avec une productivité en hausse de 1,9%. Plus pertinentes que le salaire horaire moyen qui figure dans le rapport de l’emploi, ces statistiques devraient conforter la Fed dans sa posture attentiste.

L’adoption, après plusieurs mois de négociations, d’un programme budgétaire consacré aux infrastructures a reçu un accueil placide. Le plan chiffré à 1000 milliards de dollars implique en réalité un supplément de dépenses fédérales de 550 milliards, échelonnées sur plusieurs années et partiellement financées par de nouvelles recettes. L’impulsion à court terme est sans commune mesure avec les plans de soutien mis en œuvre pour répondre à la pandémie de Covid-19. Après les infrastructures, le Congrès aborde un paquet «humain» chiffré à 3500 milliards de dollars qui va se heurter à une forte opposition des Républicains.

Sur le front sanitaire, le variant «Delta» se propage à un rythme inquiétant aux Etat-Unis. Le nombre de nouveaux cas a atteint 130.000 en moyenne-mobile sur une semaine, avec des répercussions évidentes sur le système hospitalier qui est saturé dans certaines régions. Ce nouvel épisode de la crise sanitaire infirme le scénario de normalisation et ébranle la confiance des consommateurs: en première estimation, l’indice de l’Université de Michigan a chuté de plus de dix points en août!

Les taux d’intérêt en euros demeurent sous pression

En Europe, le rendement du «Bund» allemand à dix ans est resté aux environs de -0,45%. L’accélération de l’inflation observée en Allemagne est imputable à un effet de base lié à la réduction temporaire du taux de TVA, entre juillet à décembre 2020. Dans l’orbite de la zone euro, les emprunts en francs suisses présentent aussi des rendements stables. Au Royaume-Uni, le rendement du «Gilt» à dix ans est stationnaire, à proximité de 0,6%.

Sur le marché des emprunts d’entreprises, les primes de risque continuent à évoluer près des niveaux les plus bas atteints depuis le début de la crise sanitaire.