Malgré quelques hésitations en lien avec la propagation du Covid-Sars-2 en Occident, les investisseurs affichent un fort appétit pour les actifs risqués et se détournent des obligations de première qualité qui présentent le désavantage de ne pas rémunérer les épargnants, voire de les ponctionner. On observe toutefois une détente peu significative de la structure des taux d’intérêt en dollars au terme d’une semaine sans relief. Le rendement du «T-Note US» à 10 ans a reflué à 0.92 %, mais n’efface pas le rebond provoqué par les perspectives de relance de budgétaire suite à la reprise du dialogue entre parlementaires Démocrates et Républicains.
Bien que la contestation des résultats électoraux persiste sur les réseaux sociaux, les investisseurs ont escompté la défaite de Donald Trump qui vient de subir un nouveau revers de la part de la Cour Suprême. Les Etats ont tous nommé leurs «grands électeurs» qui s’apprêtent à conduire Joe Biden à la Maison Blanche. Le choix d’attribuer le poste de Secrétaire du Trésor à Janet Yellen a déjà été salué par Wall Street qui espère une collaboration harmonieuse avec la Réserve fédérale et une politique fiscale accommodante, mais sans excès.
Actualité conjoncturelle américaine contrastée
L’actualité conjoncturelle aux Etats-Unis est contrastée. Au rang des nouvelles réjouissantes, on observe une amélioration sensible de la confiance des consommateurs (indice préliminaire de l’Université de Michigan à 91.8 en décembre après 87 en novembre), alors que la situation sanitaire demeure critique avec plus de 200.W000 nouveaux cas détectés quotidiennement, plus de 1500 décès et près de 110.000 hospitalisations en cours. La pandémie est toujours là, mais elle fait moins peur qu’auparavant. Les ménages ont appris à vivre avec cette menace qui pourrait disparaître en 2021 si les vaccins se révèlent dignes des grands espoirs qu’ils suscitent depuis début novembre sur les marchés financiers. Le rebond des demandes d’indemnités de chômage confirme toutefois le relâchement prématuré du marché du travail.
Vers un redressement des taux d’intérêt en dollars
L’autorisation accordée vendredi à Pfizer/BioNTech par la FDA ouvre la voie à une campagne de vaccination cruciale pour valider l’optimisme qui alimente depuis plusieurs mois le rebond des actions et des emprunts d’entreprises. La maîtrise de l’épidémie devrait favoriser un fort rebond de l’activité et des profits en 2021, avec comme effet secondaire un redressement des taux d’intérêt en dollars US. Dans cette perspective, une majorité de stratèges estiment que les obligations gouvernementales généreront des pertes l’an prochain. Les emprunts d’entreprises devraient mieux résister, mais la forte décrue des primes de risque observée depuis le printemps passé altère sérieusement le potentiel de gains en 2021. Le renforcement de l’activité devrait bénéficier aux segments «high yield» et « émergent».
En bref, la baisse concomitante des taux d’intérêt sans risque et des «spreads de crédit» ne devrait pas persister l’an prochain. Le scénario central implique le rebond des premiers et une baisse modérée des primes de risque. Un scénario alternatif, impliquant un rebond des «spreads» et un repli des taux d’intérêt, n’est pas totalement exclu si la reprise déçoit.

Chute du «Bund» à dix ans
En Europe, l’actualité économique est plus riche. Le menu comportait une réunion du Conseil des gouverneurs de la BCE. Christine Lagarde et ses collègues ont annoncé une extension du programme d’achats d’actifs mis en œuvre pour répondre à la pandémie (500 milliards d’euros supplémentaires pour un total de 1850 milliards, pour neuf mois de plus) assorti de réinvestissements assurés jusqu’à fin 2023. En d’autres termes, un resserrement de la politique monétaire est hautement improbable avant 2024.
La décision de la BCE et la dégradation de la situation sanitaire en Allemagne, où un confinement assez strict est instauré pour trois semaines, ont favorisé une baisse des taux d’intérêt en euros. Le rendement du «Bund» à dix ans est tombé à -0.61 %, soit tout près des niveaux les plus bas observés depuis le rebond postérieur à la première vague de Covid-19. Le «spread» infligé à l’Italie a fléchi à 1.1 %, ce qui permet au gouvernement italien d’accéder à des conditions de financement sans précédent.
Expansion persistante de l’économie britannique
Au Royaume-Uni, le rendement du Gilt à 10 ans est tombé à 0.2 % avant de se redresser en réponse à une nouvelle prolongation des négociations d’un accord commercial avec l’UE. Les indicateurs récents traduisent une expansion persistante de l’économie britannique (PIB en hausse de 0.4 % en octobre, vive progression des ventes au détail) en dépit de la résurgence des cas de Covid-19. La Grande-Bretagne a d’ores et déjà débuté une campagne de vaccination suite à l’approbation express du produit proposé par Pfizer/BioNTech. En Suisse, les rendements sont stationnaires, à des niveaux déprimés, alors que la BNS s’apprête à dévoiler son nouvel « examen de la situation économique monétaire » et à réaffirmer sa volonté de contenir la force excessive du franc suisse sur le marché des changes.