La blockchain Ethereum est aujourd’hui considérée comme la plateforme leader de la finance programmable. Elle a très rapidement conquis la cryptosphère en 2015, par le biais de contrats intelligents (smart contracts) qui ont révolutionné un secteur qui en était encore à ses balbutiements. Ethereum se démarque en effet du système en place, le bitcoin, au niveau de l’efficacité des contrats intelligents. L’Ether (abrégé ETH), le jeton que nous négocions tous, est un actif natif utilisé pour payer les frais de transaction dans la blockchain.
Les contrats intelligents sont des programmes informatiques d’exécution automatique, ou des accords numérisés qui entrent en jeu une fois que certains paramètres sont atteints. Les caractéristiques de programmabilité d’Ethereum compatibles avec les contrats intelligents permettent aux utilisateurs de mettre en place et d’exécuter des applications décentralisées (dApps) qui servent de base à une vaste infrastructure, supportant et donnant lieu à des jetons fongibles (stable coins, meme coins, etc.) et non-fongibles (NFT), des applications de finance décentralisée (DeFi), des métavers, et bien plus encore. Ce système est susceptible de bouleverser de nombreux secteurs, des finances à la santé.
La capitalisation boursière de l’Ether représente près de la moitié de celle du bitcoin, mais la valeur réelle de l’écosystème Ethereum réside dans les jetons intégrés, qui dépassent 410 milliards de dollars, ce qui montre bien qu’Ethereum lutte dans la même catégorie. Les jetons ETH représentent environ 225 milliards de dollars de la valeur de l’écosystème et le reste est à mettre au compte des stable coins, des meme coins et des NFT. Cette année, l’Ether, en hausse de plus de 50% dans un contexte macroéconomique très complexe, a dépassé la plupart des actifs. Il y a à peine plus d’un mois, Ethereum a achevé des mises à jour extrêmement complexes, finalisant ainsi le passage d’un mécanisme de consensus «preuve de travail» (proof-of-work - PoW) consommant beaucoup d’énergie à un mécanisme «preuve d’enjeu» (proof-of-stake - PoS) réduisant la consommation d’énergie de plus de 99,9%.
La PoS dépend du staking, qui consiste dans le verrouillage d’ETH au sein de contrats intelligents afin de valider les transactions tout en conservant la sécurité de la blockchain. A l’heure actuelle, près de 20% de l’offre totale d’ETH est stakée, avec des récompenses potentielles moyennes proches de 8% (avec correction de l’inflation). En revanche, d’autres PoS ont un taux de staking moyen bien supérieur à 60% et des récompenses moyennes proches de 2,5% (avec correction de l’inflation). Les rendements d’Ethereum n’ont cessé d’augmenter du fait de mécanismes de brûlage de l’offre «supply-burn», qui culminent en périodes de forte demande pour la blockchain. Ils sont parvenus à l’emporter sur les récompenses de staking accroissant l’offre, ce qui expose la blockchain à des conditions déflationnistes. Le staking peut prendre différentes formes, la plus simple passant par les Liquid Staking Derivatives (LSD), qui sont des jetons créés par des validateurs en guise de créances liquides sur les actifs stakés. Les LSD sont sur toutes les lèvres dans le domaine de la finance décentralisée, se montant à quelque 18 milliards de dollars et capturant plus de 70% de la valeur totale verrouillée dans des applications DeFi d’Ethereum.
Après une croissance exponentielle en 2021, les volumes des NFT ont diminué de plus de 95% par rapport à leurs sommets historiques. La frénésie est désormais révolue, mais de nouvelles applications continuent d’apparaître et tous les regards sont tournés vers les identités numériques. La tokénisation des actifs matériels est devenue la principale cible de nombreux acteurs institutionnels, qui expriment publiquement leur désir d’amener des billions de dollars sur la blockchain.
La principale restriction d’Ethereum réside dans son évolutivité ou sa scalabilité; la forte demande de réseau a fait grimper les coûts des transactions et les délais de traitement, rendant le réseau excessivement tributaire des rollups layer-2, qui regroupent un grand nombre de transactions et les enregistrent dans Ethereum sous la forme d’un résultat. La mise à niveau sharding, qui permet aux blockchains de se partitionner en segments plus petits et plus gérables, devrait survenir d’ici fin 2023 et résoudre les problèmes de scalabilité.
Les applications possibles des technologies compatibles Ethereum semblent infinies, mais il faudra du temps et de la formation pour voir ces scénarios se matérialiser. La crise de la cryptomonnaie rencontrée l’année dernière a mis à l’épreuve la blockchain Ethereum. Toutefois, celle-ci a su faire preuve de résilience et elle a fonctionné conformément aux attentes. Toute l’attention se porte aujourd’hui sur la réglementation, les autorités américaines n’ayant pas réussi à définir si les actifs numériques sont des marchandises ou des titres, et lesquels. Les incertitudes devraient perdurer et il faut s’attendre à une certaine volatilité car les conditions top-down, au niveau macroéconomique et réglementaire, resteront déterminantes pour les actifs numériques.