Cet été, «L’Agefi» publie en exclusivité 10 chapitres du livre paru cette année de Dominique Freymond dans lequel il partage son expérience d’administrateur d’entreprise.
Résumé
Comment mettre sur pied un conseil consultatif au service d’une start-up et surtout réussir la première rencontre des futurs membres?
Anecdote
Quentin et son ami Ian ont lancé une start-up dans le domaine technologique. Ils ont investi une partie de leurs économies et forment à eux deux le conseil d’administration. Quentin assume la direction de l’entreprise et dialogue de temps en temps avec Ian, domicilié à l’étranger, qui ne souhaite pas de responsabilité opérationnelle. Avec l’appui de leur fiduciaire, ils tiennent une assemblée générale annuelle et une séance du conseil d’administration formelle.
Afin de diminuer les frais, ils ont choisi l’opting-out, ce qui prive Quentin d’un dialogue avec le réviseur. Lorsqu’il doit prendre des décisions opérationnelles, il n’a pas beaucoup de personnes vers qui se tourner. Son épouse est engagée professionnellement dans un autre domaine, ses amis chefs d’entreprise n’ont pas beaucoup de temps à disposition, ses collaborateurs peuvent mal interpréter ses réflexions et de toute manière, une partie de ses projets est confidentielle…
Au vu de la situation, il demande l'avis de Didier, un consultant spécialisé en gouvernance, qui lui propose de mettre sur pied un conseil consultatif. Une telle structure lui permettra plus facilement de trouver des membres car ils n’exercent aucune responsabilité légale, sauf s’ils sont considérés par le juge comme organe de fait. Cela lui permet de garder sa capacité de décision tout en pouvant discuter de ses idées avec un panel de personnes compétentes et complémentaires. Avant de se lancer dans une liste intuitive de quelques candidatures, une analyse des aspects fondamentaux s’impose. A quoi doit servir le conseil consultatif, quels sont les thèmes qu’il va aborder, quelles sont les compétences nécessaires, qui présidera les réunions, comment seront rémunérés ses membres, etc.?
Ces questions clarifiées, une recherche plus rationnelle de candidatures est lancée. Dans une première étape, le conseil sera composé de personnalités de Suisse romande avec une diversité des genres et une complémentarité de compétences. Didier contacte sans engagement les personnes retenues afin de vérifier leur disponibilité et leur ouverture à rejoindre un tel conseil.
A la première réunion, quatre personnes ont répondu positivement à l’invitation. Après les souhaits de bienvenue de Quentin, Didier propose un tour de table où chacun présente son parcours professionnel, ses compétences, mais aussi quelques aspects plus personnels. Suit une présentation détaillée de la start-up, de ses activités et des modalités de mise sur pied d’un conseil consultatif: le nombre de séances, la modeste rémunération, mais aussi les avantages à pouvoir contribuer à ces réunions ainsi que le nouveau réseau relationnel.
Après la partie questions-réponses, Quentin remet à chacun un projet de contrat de mandat, qui formalise par écrit sa proposition. Un délai de réflexion est laissé à chacun pour prendre sa décision et renvoyer ou pas le contrat signé. Elodie se retire du projet par manque de disponibilité. Les trois autres confirment leur intérêt. La date de la prochaine séance est fixée, ainsi que les trois premiers thèmes qui seront abordés. Le conseil peut prendre son envol!
Quelques pistes de réflexion
Pour éviter que le conseil consultatif soit considéré comme organe de fait, il est essentiel que le conseil d’administration remplisse son rôle et que ses décisions soient protocolées. Il faut aussi éviter de proposer des décisions au conseil consultatif, mais aborder d’une manière ouverte des thèmes de réflexions ou des projets.
En principe, il n’y aura pas de procès-verbal des rencontres du conseil consultatif. Un ordre du jour est communiqué à l’avance, accompagnés parfois de quelques documents préparatoires.
Un conseil consultatif apporte pleinement sa contribution après deux ou trois séances, le temps que ses membres connaissent mieux l’entreprise et ses enjeux.
Idéalement, il devrait être présidé par une personne externe, laissant ainsi au représentant du conseil et/ou de la direction toute capacité à écouter les discussions et propositions, à réfléchir puis à discuter ou intervenir à bon escient. Au lieu de chercher à obtenir des décisions, il doit aussi ajuster sa posture afin d’encourager une discussion ouverte, créative et critique.

*«Gouvernance d’entreprise: l’envers du décor en 100 anecdotes», Dominique Freymond, Editions Châteaux et Attinger, 2023, 265 pages, CHF 34.-