La hausse moyenne de la température à la surface de la Terre est de 1,2°C. Mais en Suisse elle atteint le double. Depuis 1950, le volume des glaciers a diminué de moitié; la fonte du permafrost met en péril la stabilité des zones de haute montagne, les étages de la végétation sont bousculés et les incendies de forêts menacent. L’an dernier, dans bien des régions, les animaux ne pouvaient plus être nourris sur les pâturages dont l’herbe avait séché et l’eau devait être amenée par camions; l’avenir de l’énergie hydraulique n’est plus garanti et le tourisme d’hiver doit se réinventer. Le changement climatique est bel et bien en marche.
Cela n’empêche pas les adversaires de la loi-cadre «sur les objectifs en matière de protection du climat» soumise au vote populaire ce 18 juin de déployer à nouveau leur arsenal de contre-vérités et de ressentiments qui ont torpillé voici deux ans la loi sur le CO2. Déjà, les sondages donnant la victoire au «oui» commencent à fléchir, alors qu’au Parlement, comme en 2021, une large coalition avait soutenu la loi.
Nos sociétés divisées
On note par ailleurs une radicalisation des positions: d’un côté des personnes, jeunes et moins jeunes, qui désespèrent devant la difficulté qu’a notre société de changer de cap et qui passent à diverses formes de désobéissance civile, et de l’autre, un nombre bien plus grand de personnes, réunies autour du déni et du «touche pas à mon mode de vie, quoi qu’il en coûte (aux autres)».
Ainsi, la finance durable n’est pour les premiers qu’un coupable ravalement de façade du capitalisme, du greenwashing par définition et pour les seconds, une soumission de l’économie à des objectifs extérieurs à elle, qui selon eux doit se limiter à maximiser les taux de retour sur investissement. Les premiers travaillent sur la peur, les seconds se rassurent faussement. Mais la peur encourage le repli sur soi, nourrissant le courant national-populiste qui progresse dans la plupart des pays.
Une loi qui fédère
Au cœur de la loi sur le climat: une réduction des émissions de gaz à effet de serre en Suisse par rapport à 1990 comme suit:
a. dans le secteur du bâtiment: 1. jusqu’en 2040: de 82%, 2. jusqu’en 2050: de 100%;
b. dans le secteur des transports: 1. jusqu’en 2040: de 57%, 2. jusqu’en 2050: de 100%;
c. dans le secteur de l’industrie: 1. jusqu’en 2040: de 50%, 2. jusqu’en 2050: de 90%.
Cette feuille de route claire, précise et vérifiable permettra aux uns de participer aux avancées et aux autres de se réjouir des nombreux emplois liés à des activités économiques ancrées dans le savoir-faire des régions.
L’impact carbone hors du pays est pris en compte
Si l’on considère le poids carbone de nos importations, les émissions dues à notre pays passent de 46 millions de tonnes de CO2/an à 115 millions et selon McKinsey (Klimastandort Schweiz, juillet 2022), l’impact des investissements suisses à l’étranger est bien plus important, d’un facteur 20 à 30.
Adressant cet enjeu, la loi dispose que «la Confédération veille à ce que la place financière suisse apporte une contribution effective à un développement à faible émission capable de résister aux changements climatiques. Il s’agit notamment de prendre des mesures de réduction de l’effet climatique des flux financiers nationaux et internationaux.» Les efforts sont donc équitablement répartis: à chacun sa part en fonction de son impact et de ses responsabilités. Alors ne ratons pas la session de rattrapage du 18 juin, trop de temps a déjà été perdu.