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La grâce du pouvoir

Le nouveau conseiller fédéral UDC Albert Rösti a réussi à se poser comme un homme d’Etat. Par Jacques Neirynck

«Albert Rösti a été deux fois rectiligne: une fois en tant que chef de parti, une seconde fois en tant que conseiller fédéral.»
KEYSTONE
«Albert Rösti a été deux fois rectiligne: une fois en tant que chef de parti, une seconde fois en tant que conseiller fédéral.»
Jacques Neirynck
Ancien conseiller national
26 septembre 2023, 19h00
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Albert Rösti siège au Conseil fédéral depuis décembre 2022, chef du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (Detec). Il s’est aussi affirmé comme l’un des trois poids lourds du gouvernement aux côtés de Karin Keller-Sutter et d’Alain Berset.

Albert Rösti a ainsi défendu honnêtement la loi climat qu’il avait cependant attaquée lorsqu’il était président de l’UDC. Il s’est occupé du renforcement de la ligne de train entre Lausanne et Genève. Il est réaliste sur l’approvisionnement énergétique. Il ne veut pas laisser intouchable le loup, au vu des dégâts toujours plus élevés. Il est pondéré sur la redevance de la SSR. C’est un heureux conseiller fédéral qui tranche sur ses deux prédécesseurs, Christoph Blocher et Ueli Maurer demeurés l’un et l’autre représentants de leur parti au sein du Conseil fédéral, inaptes à l’envergure de l’homme d’Etat qu'Albert Rösti est tout de suite devenu.

Certains s’en sont vertueusement offusqués. Comment la même personne peut, face au tribunal de l’opinion publique d’abord prononcer un réquisitoire contre, puis un plaidoyer pour une loi? Quand a-t-il été sincère? Quelle était sa conviction? A-t-il des convictions? Les politiciens ne sont-ils pas tous des abuseurs?

Or, Albert Rösti a été deux fois rectiligne: une fois en tant que chef de parti, une seconde fois en tant que conseiller fédéral. Il a deux fois rempli sa fonction. Son opinion personnelle ne compte pas dans les deux occurrences. La première fois il a fait ce qu’il fallait pour accéder au pouvoir par l’entremise du parti le plus important et il y a réussi; une seconde fois il a exercé ce pouvoir en conformité avec le bien public et il a de bonnes chances de réussir. Dans l’histoire, on trouverait bien d’autres exemples de duplicité apparente qui sont en fait la continuité d’un objectif visé depuis deux positions différentes.

Albert Rösti est efficace parce qu’il est compétent. On ne peut lui raconter n’importe quoi au sujet de sa fonction

Jacques Neirynck

Dans cette accession au pragmatisme, sa formation n’aurait-elle pas joué un grand rôle? Un agronome ne peut qu’être sensible aux dégâts des loups sur les troupeaux et reste impassible devant les amoureux irréalistes de la nature. Un ingénieur évalue lucidement nos réserves en énergie et ne se laisse pas manipuler par de fausses informations en provenance de divers lobbies. S’il veut réussir un technicien doit être détaché de tout ce qui n’est pas la matérialité.

Albert Rösti est efficace parce qu’il est compétent. On ne peut lui raconter n’importe quoi au sujet de sa fonction: les routes, les chemins de fer, l’environnement. C’est un ingénieur en charge des techniques. On ne peut pas en dire autant du médecin en charge de la Diplomatie, de l’économiste en charge de la Justice ou de la juriste en charge de l’armée où elle n’a pas fait de service: chacun de ces gouvernants se trouve devant un domaine qu’il ne maîtrise pas par sa formation ou par sa carrière. Certains s’en flattent au nom du mythe de la milice où n’importe qui peut faire n’importe quoi, au nom d’une grâce octroyée au peuple suisse. Inconsciemment, ils l’ajustent à l’élection d’Israël, conduit à travers les aléas de l’histoire par le concours perpétuel de Dieu lui-même, tout-puissant selon notre Constitution.