Il y a quelques jours, la Confédération a publié les chiffres de la péréquation financière fédérale. Le fondement de ce mécanisme, comme nous l’explique l’administration fédérale, est l’esprit de solidarité confédérale où les «cantons économiquement forts aident les cantons qui sont plus faibles financièrement».
L’objectif est de réduire les disparités qui existent entre les cantons en termes de capacité économique. Sur cette base, Genève est considéré comme un canton à fort potentiel économique et versera donc, en 2024, un montant de près de 200 millions de francs au «pot commun fédéral». Une contribution qui le place derrière les cantons alémaniques de Zurich (462,2 millions), Zoug (382,9 millions), Schwytz (215,7 millions), mais devant Bâle-Ville (133,2 millions), Nidwald (45 millions) et Obwald (666.000 francs). Toutefois, si l’on rapporte ce montant par habitant, la contribution des Genevois (394 francs par habitant) est bien supérieure à celle des Zurichois (300 francs par habitant).
En matière d’impôt fédéral direct, Genève a contribué, en 2022, à 14,5% du total des recettes de cet impôt, soit 3,85 milliards. Genève se place ainsi en deuxième position, en termes de participation aux recettes fiscales fédérales, juste derrière Zurich qui a versé près de 5 milliards de francs à la Confédération. Toutefois, rapporté à la population, les Genevois ont payé davantage que les Zurichois – 7700 francs contre 3333 francs.
Ces chiffres soulèvent alors une question: pourquoi Genève, qui contribue pourtant grandement à la solidarité confédérale et aux recettes fiscales, semble régulièrement oublié dans les financements fédéraux, notamment en matière d’infrastructures?
Ce sentiment d’exclusion est renforcé par le refus d’adopter un tracé ferroviaire alternatif entre Genève et Lausanne par le Conseil fédéral, alors que de telles infrastructures existent entre les villes alémaniques
Arnaud Bürgin
L’un des exemples le plus frappant est le manque d’investissements dans le réseau ferroviaire depuis Genève, particulièrement en comparaison avec les projets ambitieux envisagés de l’autre côté de la Sarine. La réduction prévue de 50% des liaisons ferroviaires entre Genève et Zurich dans le projet d’horaire 2025 des CFF ou la durée du trajet entre Genève et Lausanne, qui ne cesse d’augmenter au fil des ans, mettent en lumière une politique qui semble négliger l’importance de Genève comme hub économique.
Ce sentiment d’exclusion est renforcé par le refus d’adopter un tracé ferroviaire alternatif entre Genève et Lausanne par le Conseil fédéral, alors que de telles infrastructures existent entre les villes alémaniques. La vétusté du réseau ferroviaire en Suisse romande est d’ailleurs confirmée par les CFF eux-mêmes qui utilisent ce motif pour justifier d’une ponctualité plus mauvaise en Suisse occidentale (89,4%) qu’en moyenne suisse (92,5%).
Cette situation est d’autant plus critique que l’Arc lémanique devrait connaître une croissance démographique significative, promettant une augmentation des besoins en transports de près de 55% d’ici à 2050. A cet égard, les retards annoncés dans les travaux d’aménagement et d’agrandissement de la gare Cornavin, alors même qu’ils n’ont pas encore commencé, sont une mauvaise nouvelle de plus.
La fragilité de notre positionnement géographique aurait dû inciter les autorités fédérales à investir, il y a fort longtemps, dans les infrastructures qui permettent de relier notre canton au reste de la Suisse.
Il est impératif de rappeler que Genève n’est pas simplement un contributeur net à la péréquation financière nationale; c’est un acteur clé du dynamisme économique de la Suisse. Le canton mérite une reconnaissance équitable et des investissements qui reflètent sa contribution substantielle. C’est une question de solidarité nationale et il n’est pas encore trop tard pour y remédier. Espérons que ce rappel chiffré sera entendu à Berne et permettra de débloquer les fonds nécessaires pour maintenir l’attractivité de notre canton.