Envolée, la belle performance boursière helvétique du premier trimestre. Le monde a fondamentalement changé. Les actions suisses se trouvent désormais prises dans la tempête d’une guerre commerciale qui voit s’affronter les trois grands partenaires commerciaux de la Confédération, accompagnée de la potentielle imposition d’une taxe de 31% sur les exportations aux Etats-Unis et la menace de droits de douane sur le secteur pharmaceutique. Des perspectives difficiles dans un contexte empreint d’incertitudes.
Les grandes capitalisations boursières du SMI affichent une exposition régionale de leur chiffre d’affaires de 35% aux Etats-Unis, de 33% à l’Union européenne (UE) et de 20% à l’Asie (essentiellement la Chine). Pour le DAX allemand, ces mêmes indicateurs sont de respectivement 26%, 33% et 20%.
L’essentiel de l’exposition du marché actions suisses aux Etats-Unis provient du secteur de la santé dans le SMI (37%), avec environ 30% d’entreprises pharmaceutiques. Or, 60% des exportations de ce secteur sont destinées au marché américain. Une dépendance qui pèse pour une industrie tournée vers le commerce extérieur et dépendant de la croissance internationale. Le secteur financier sera aussi confronté à des vents contraires, compte tenu de la baisse du taux directeur en Suisse, qui se dirige vers zéro, et un franc fort. Quant aux biens de consommation de base, ils seront affectés par les difficultés d’un commerce international complexe.
Des bénéfices revus à la baisse
De nombreux économistes estiment actuellement la probabilité d’une récession américaine à 50%. L’ampleur du ralentissement économique dépendra de l’effet inflationniste des nouveaux tarifs douaniers sur les dépenses des consommateurs américains, et si leur pouvoir d’achat pourra être soutenu par une baisse du prix du pétrole, des réductions d’impôts, des coûts hypothécaires plus faibles et des prix de services plus bas grâce à la dérégulation. Nous tablons sur un rythme de croissance du PIB réel de 1,2% cette année aux Etats-Unis, soit un ralentissement plutôt qu’une récession. Pour le reste du monde et à l’exception de la Chine et de l’Inde, qui partent de taux de croissance plus élevés, les perspectives économiques seront plutôt faibles. L’UE pourrait connaître une expansion de 0,9%, la Suisse de 0,8% si des accords commerciaux sont conclus avec les Etats-Unis et d’autres partenaires commerciaux.
Pour les bénéfices des entreprises helvétiques, cela implique des révisions à la baisse également. Au lieu de la progression moyenne de 9% attendue sur les titres du SMI, une hausse de 4% à 6% semble en ligne avec la nouvelle donne conjoncturelle en 2025. Des chiffres conformes aux expectatives pour le marché européen dans son ensemble.
Par ailleurs, il convient d’anticiper une force du franc durable dans un contexte incertain. Nous nous attendons à ce que la Banque nationale suisse (BNS) ramène son taux directeur à 0%, sans mesures de soutien visant les marchés des changes. Les rendements des obligations d’Etat suisses pourraient également s’approcher de zéro, ce qui pèserait sur les résultats des banques commerciales. Des taux négatifs ne sont pas à exclure dans un scénario de risque de récession accru.