La prime de nouvelle émission offerte aux investisseurs pour les inciter à souscrire aux obligations d’entreprises connait une forte augmentation. Les conséquences sur le marché secondaire se font ressentir parfois sur des secteurs entiers du marché. Pour rappel, lorsqu’un émetteur souhaite placer un nouvel emprunt, il lui faut persuader les investisseurs d’y souscrire plutôt que d’investir dans ceux qui se traitent déjà sur le marché secondaire. A cette fin et au moment du lancement, ce nouvel emprunt devra procurer un rendement supérieur à celui qu’une obligation du même émetteur et de durée similaire devrait offrir, si elle était négociée sur le marché secondaire. La hausse actuelle de cette prime de nouvelle émission résulte de l’exigence d’une plus forte rémunération pour s’aventurer dans un marché du crédit en prise avec des pertes historiquement élevées. Elle pousse les investisseurs à vendre les obligations existantes des émetteurs concernés, dont la valeur semble soudainement trop chère sur le marché secondaire.
1,85 milliard d’euros en trois tranches
Ainsi, toute quête de financement sur ce marché quelque peu fragilisé peut potentiellement faire grimper le rendement de la dette en circulation de l’émetteur en question, celui de son secteur, voire celui de l’ensemble du marché selon l’importance de la taille de certains emprunts. En guise d’exemple, National Grid, le gestionnaire britannique du réseau d’électricité et de gaz, a levé 1,85 milliard d’euros en trois tranches le 23 mai. Le groupe a payé entre 25 et 36 points de base de rendement au-dessus de sa dette existante afin d’attirer les investisseurs. Ce jour-là, la prime de risque moyenne du secteur des utilities s’est élargie de 1,3 point de base pour atteindre 82,8 points de base, soit plus du double de l’écartement constaté au sein de l’indice Bloomberg des obligations d’entreprises de catégorie «investment grade» en euro.
Durcissement de ton de la part des banques centrales
La dynamique a donc changé. Avant le changement de cap des banques centrales, les primes à l’émission étaient faibles mais se resserraient néanmoins jusqu’à converger vers les rémunérations inférieures du marché secondaire. La tendance était alors à la quête de rendement. Puis, le durcissement de ton de la part des banques centrales a produit l’effet inverse. Les primes à l’émission montent à présent en flèche et c’est le marché secondaire qui converge vers les rendements supérieurs du marché primaire. Cela revient à dire qu’un investisseur peut souscrire à un nouvel emprunt plus rémunérateur d’un côté et, de l’autre, enregistrer des pertes sur les positions existantes au sein de son portefeuille. Autrement dit, il est difficile d’échapper au dommages collatéraux causés par le revirement restrictif des banques centrales. Faut-il dès lors considérer le verre à moitié vide ou à moitié plein? Sauf incident majeur, un brin d’optimisme est légitime. En effet, la hausse importante de la prime à l’émission permet à certains nouveaux emprunts de bien se comporter sur le marché secondaire, allant même jusqu’à entrainer un resserrement de la prime. Et pour finir sur une note positive, il semble que la « force » revienne du côté des investisseurs.