03 septembre 2020, 22h59
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La manière dont la Grèce a extrêmement bien géré la crise du Covid-19 est passée relativement inaperçue. Les chances d’un tel scénario étaient pourtant minces sachant que le pays sortait juste d’une crise de la dette longue de dix ans. Néanmoins, le gouvernement de Kyriakos Mitsotakis a agi dès les premiers signes de propagation du virus. Le pays a anticipé en imposant des mesures de confinement, en fermant les écoles et en exigeant des commerces non essentiels qu’ils cessent leur activité dès le mois de février. Fin août, la Grèce enregistrait 8664 cas et 242 morts.
Cependant, les plus gros défis sont à venir. Faire face à une saison estivale décevante et réduire la dépendance vis-à-vis du tourisme, poursuivre un programme de réformes ambitieux et attirer des capitaux privés seront les priorités de l’agenda du gouvernement. La Grèce maintiendra-t-elle son programme de réformes et de développement face à un environnement si incertain?
De l’austérité au redressement
Il y a un peu plus de deux ans, la Grèce a amorcé sa transition du statut de pays européen le plus fragile à celui le plus solide, à l’aune de la croissance de son PIB et du dynamisme de son économie. Le gouvernement a mis en œuvre les réformes indispensables, les baisses d’impôts et les plans de développement ambitieux qu’il avait promis. Malheureusement, ce scénario idéal s’est brusquement évanoui lorsque la crise du Covid-19 a contraint Kyriakos Mitsotakis à prendre des mesures exceptionnelles. Pour un pays comme la Grèce, une telle crise pourrait sérieusement compromettre les perspectives de croissance future.
Le tourisme pourrait s’avérer être le talon d’Achille de la Grèce. En effet, entre un quart et un tiers environ du PIB du pays provient indirectement du tourisme. La fermeture des frontières et l’arrêt des vols internationaux auront indéniablement un impact considérable sur le tourisme, avec des pertes estimées à quelque 10 milliards d’euros. Bien que la Grèce soit restée aussi ouverte que possible pour la saison estivale 2020, ces efforts seront probablement insuffisants pour sauver la saison; aux mieux, ils permettront de limiter les dégâts. Le trafic des passagers en juillet n’atteignait que 15 à 25 % du niveau de juillet 2019 et certains hôtels ont décidé de ne pas ouvrir cette saison. Bien que le problème ne soit pas nouveau, la crise actuelle a rappelé à la Grèce qu’une dépendance excessive à l’égard d’un seul secteur n’est pas viable à long terme.
Sur le front financier, la Grèce a obtenu une allocation de 72 milliards d’euros, dont 32 milliards de subventions, dans le cadre du plan de relance de 750 milliards d’euros convenu par l’Union européenne. Ces subventions représentent plus de 17% du PIB du pays, la plus forte proportion parmi les pays de l’UE. Kyriakos Mitsotakis a déjà mis en place un comité de pilotage chargé d’établir un plan pour tirer le meilleur parti de cet argent frais. En outre, le cabinet du Premier ministre a été remanié de sorte à accroître l’efficacité du gouvernement dans la gestion des fonds de l’UE.
Ses dirigeants, un atout essentiel
Enfin, le pays tirera également de précieux enseignements du rapport rédigé par le comité Pissarides portant sur une augmentation systématique des revenus qui permettra d’accroître la productivité, l’emploi et l’investissement, cette étude jettera les bases de la prochaine phase de croissance du pays.
La Grèce a contrôlé la pandémie sur son territoire en prenant les bonnes décisions et en les mettant en œuvre sans tarder. Elle dispose de dirigeants parmi les plus compétents en Europe, cela se révèle être un atout essentiel pour affronter la crise actuelle. À terme, les bénéfices tirés de la gestion de cette crise feront très probablement sentir leurs effets sur de nombreux aspects de l’économie, renforçant ainsi la crédibilité de la Grèce. L’avenir immédiat sera naturellement problématique, mais compte tenu de ses accomplissements, il y a de bonnes raisons de penser que la Grèce s’en sortira la tête haute et reprendra le chemin de la croissance.
*Responsable des investissements alternatifs, Banque Reyl