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Le marché des obligations spéculatives en suspension

L'aversion au risque a progressé alors que le marché se montre moins confiant pour les entreprises fortement endettées. Certains investisseurs estiment toutefois que ces sociétés sont plus solides que par le passé.

Gianni Pugliese
Mirabaud - Analyste obligataire
25 août 2022, 21h30
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La demande d’obligations spéculatives d’entreprises américaines s’est réduite dernièrement. Les publications à venir sur l’inflation et l’emploi, des chiffres cruciaux précédant la réunion du 21 septembre de la Fed, ont fini par réduire l’ardeur estivale qui a bénéficié à la classe d’actif jusqu’à peu.

Le changement d’attitude reflète une aversion au risque plus générale au sein d’un marché qui s’inquiète du fait qu’une Fed très agressive ne finisse par nuire aux entreprises fortement endettées. Les discours de certains responsables font en effet craindre que, contrairement à ce qui avait été espéré, la banque centrale pourrait maintenir une ligne dure dans sa lutte contre la hausse des prix. Résultat, après avoir chuté durant une grande partie de l'été, la prime de risque de l’indice Bloomberg des obligations spéculatives est repartie en hausse. Du 11 au 23 août, elle a grimpé de 408 à 454 points de base au-dessus du rendement des emprunts souverains américains. Avant cela, elle avait culminé à 583 points de base au début du mois de juillet.

Climat plus anxiogène

Le rendement de l’indice était alors proche de 9%. Il a baissé jusqu’à 7,4% à la mi-août, porté par l’espoir d’une fin de l’inflation persistante. Puis, le sentiment s’est détérioré. De nombreux investisseurs s'attendent à ce M. Powell souligne la détermination de la Fed face à l’inflation lors du symposium de Jackson Hole. A cela s’ajoute que des chiffres de l’emploi plus élevés que prévu le 2 septembre et de l’inflation le 13 septembre pourraient également augurer des taux plus élevés.

Malgré ce climat plus anxiogène, certains investisseurs demeurent optimistes, n’excluant pas que les obligations spéculatives puissent résister. Ils argumentent que lorsque les taux étaient bas, de nombreuses entreprises ont refinancé leur dette pour profiter de conditions d'emprunt bon marché. Ce faisant, elles ont repoussé les échéances de leurs emprunts, bénéficiant ainsi d’une meilleure marge de manœuvre.

Pénurie de nouvelles émissions

Ces investisseurs constatent aussi qu’un grand nombre d'émetteurs spéculatifs sont aujourd’hui financièrement plus solides et disposent de notations de crédit supérieures, comparé aux normes historiques. Le pic des primes de risque observé début juillet n’était alors qu’une conséquence d’anticipations exagérées des taux de défaut.

La dynamique de l’offre et la demande est aussi un facteur technique positif. Depuis le début de l'année, les émissions spéculatives seraient en baisse d'environ 80% par rapport à 2021. Cela implique que si les investisseurs ne peuvent pas compter sur le marché primaire, ils doivent se tourner vers le secondaire. Le montant nominal de l’indice a reculé de 1568 milliards de dollars à 1454 milliards. Autrement dit, la pénurie de nouvelles émissions constitue un élément important de soutien aux emprunts existants.

Que peut-on en conclure? Si certains facteurs techniques ont supporté le rally estival, l’espoir d’un ralentissement du rythme des hausses des taux de la Fed en a été le principal moteur. La correction qui a suivi reflète l’inverse. La direction que prendra le marché reste suspendue aux lèvres de M. Powell.n