2022 avait pourtant bien commencé. L’activité économique mondiale, la consommation, l’emploi, les bénéfices d’entreprises… tous les signaux de la reprise post-pandémie étaient au vert. Mais une série de chocs inattendus, dont la guerre en Ukraine, l’inflation persistante et la politique zéro-Covid de la Chine, sont venus perturber les perspectives conjoncturelles. Dans ce contexte de ralentissement de la croissance et d’inflation persistante, les banques centrales ont pris la décision de sacrifier la croissance pour stabiliser les prix en relevant les taux directeurs de manière agressive – quitte à étouffer la croissance mondiale bien avant de parvenir à juguler l’inflation.
En Suisse, l’accroissement des tensions inflationnistes mondiales s’est peut-être avéré être une aubaine. Avec des projections à 3% pour 2022, la Banque nationale suisse (BNS) a saisi l’occasion de remonter son taux directeur plus rapidement que prévu, le portant de -0,75% à -0,25% le 17 juin, mettant fin à sept ans de taux d’intérêt parmi les plus négatifs au monde.
Cette hausse de 50 points de base a surpris tout le monde. En effet, avec une inflation moins élevée qu’aux Etats-Unis ou dans la zone euro, la Suisse est moins touchée par les tensions mondiales sur les prix, notamment grâce à son mix énergétique. La vigueur du franc suisse contribue aussi à limiter l’inflation importée et la croissance des salaires est moins problématique en Suisse que dans les autres économies développées.
BNS: projection de 0,75% en 2023
Pourtant, les hausses de taux à venir de la BCE signifient que l’écart entre les taux directeurs européens et suisses se serait creusé, et la BNS se réunissant moins fréquemment que sa consœur européenne, elle doit prendre des mesures d’une ampleur plus importante pour contenir l’écart.
Avec des taux ancrés en territoire négatif depuis longtemps, la BNS se trouve ainsi renforcée dans sa décision de sortir du piège des taux négatifs. Dans le même temps, la force du dollar américain a entraîné une baisse de la valeur globale du franc suisse et la BNS ne considère donc plus sa monnaie comme étant surévaluée – un changement radical par rapport au passé. La BNS devrait donc poursuivre ses hausses de taux au rythme d’environ 50 points de base par trimestre pour atteindre un pic autour de 0,75% au début 2023.
Immobilier: un effet à retardement
Du côté de l’immobilier résidentiel, nous ne voyons pas de risque imminent d’effondrement du marché, bien que l’offre puisse se resserrer davantage dans un contexte de hausse des coûts de construction et de financement. L’accessibilité économique pourrait cependant devenir problématique, notamment pour les primo-accédants. Tant que les taux directeurs monteront, les taux hypothécaires pour de nouveaux biens ou les renouvellements seront à la hausse.
Les fondamentaux macroéconomiques de la Suisse restent solides. Le pays affiche désormais un excédent commercial de 12% du PIB, le plus élevé depuis le début de la publication de cette statistique.
Notre économie est parvenue à surmonter les ralentissements mondiaux ces dernières décennies, en partie grâce à une solide création d’emplois et à l’immigration nette qui en résulte. Après avoir résisté durant la pandémie, la croissance devrait ralentir, à un niveau encore solide de 2,2% en 2022, puis de 1,2% en 2023.