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La durabilité devient essentielle dans l'obligataire asiatique

Par Jim Veneau d'Axa IM.

Jim Veneau
Axa Investment Managers - Responsable des actifs asiatiques à revenu fixe
02 juillet 2021, 19h14
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Au regard de l’intérêt momentané pour les investissements ESG (environnemental, social, gouvernance) en Asie, la demande concernant les obligations plus durables augmente.

Les données de Morningstar pour 2020 soulignent qu’à la fin de l’année, ce sont les fonds d’actions qui constituent la part du lion des actifs ESG, avec 25,4 milliards de dollars des Etats-Unis. Toutefois, les obligations durables sont devenues très populaires – après l’introduction d’un seul fonds en Asie en 2019, 12 nouveaux produits sont arrivés l’année dernière sur le marché. Ceci reflète les tendances globales. Les obligations durables ont atteint un volume record de 491 milliards de dollars des États Unis en 2020, selon les dires du Moody’s Investors Service, par rapport à 323 milliards l’année précédente.

Un signe clair de l’appétit croissant en Asie fut la commande adressée à la première obligation durable du monde en dollars des Etats-Unis émise par un promoteur immobilier. L’obligation sur 10 ans de New World Development dont le site se trouve à Hong Kong et d’un montant égal à 200 millions de dollars des Etats-unis, a été six fois sursouscrite, avec près de 80 % attribués aux investisseurs ESG.

L’intérêt pour les obligations respectueuses de ces critères est une tendance bienvenue. La région est connue pour son bilan de durabilité relativement mauvais, dû aux niveaux d’émissions de carbone élevés, aux problèmes de pénurie d’eau, au vieillissement de la population et aux problèmes de gouvernance principalement causés par la prévalence des entreprises familiales.

Toutefois, ce sont précisément ces problèmes qui ont persuadé les investisseurs du rendement réalisable tout en participant à l’amélioration du monde qui les entoure, en favorisant le changement pour une meilleure déclaration des critères ESG, une plus grande diversité et indépendance du conseil.

Pour obtenir cet objectif, il existe un consensus parmi les acteurs du marché concernant l’urgence de trouver des solutions aux problèmes communs à tous les investisseurs, comme combler les lacunes des données ESG afin de simplifier l’implémentation. Par exemple, malgré le volume de données ESG, on ne peut que constater l’absence notable de méthodes standardisées pour quantifier de nombreux facteurs pertinents.

Ainsi, les obligations sans évaluation ESG appropriée ou caractérisées par une faible évaluation, sont supprimées de certains portefeuilles. Ceci crée une situation avec des stratégies d’investissement qui deviendront plus passives et plus concentrées après avoir entièrement satisfait aux critères ESG.

A ceci s’ajoute le fait que les facteurs ESG ont une nature dynamique, définie différemment selon les pays et les régions et qui souffrent du manque de cohérence dans les rapports et les publications.

Les sanctions compliquent l’évolution ESG des entreprises

Pour les investisseurs qui recherchent avant tout la durabilité, la Chine présente un certain atout.

Le pays s’engage à affronter la pollution et les autres problèmes climatiques, ce qui fera probablement monter en flèche les investissements dans le secteur des énergies renouvelables. 

Toutefois, le défi peut consister à investir dans les grands propriétaires d’actifs comme les fonds de pension et les compagnies d’assurance, au regard de l’absence d’exigences obligatoires concernant la déclaration ESG pour les sociétés listées.

Le changement devrait arriver en même temps que la promesse de Pékin, le plus grand producteur de gaz à effet de serre du monde, concernant la réduction des émissions d’ici 2030 – avec la neutralité carbone d’ici 2060.

Pourtant, les sanctions introduites récemment par les Etats-Unis sur les entreprises en lien étroit avec le secteur militaire chinois s’ajoutent au manque de cohérence et de clarté concernant le paysage intéressant pour les investisseurs.

Parmi les conséquences pour les investisseurs, il faut citer une certaine ambigüité concernant l’impact sur le potentiel de spéculation et la liquidité des entreprises sanctionnées. Par conséquent, l’appétit et l’aptitude des acteurs du marché à ajouter un risque via ces noms seront probablement très influencés.

En réponse aux sanctions, le fournisseur d’indices internationaux FTSE Russell, par exemple, a déclaré vouloir retirer huit entreprises chinoises de plusieurs de ses références internationales. S&P Dow Jones Indices, NASDAQ et MSCI ont réagi de manière comparable.

Entretemps, JPMorgan, l’un des fournisseurs d’indices obligataires pour les marchés émergents clés et l’Asie, a déclaré qu’il n’ajoutera aucun risque aux noms sanctionnés dans la composition de son indice en précisant que les obligations existantes émises par ces entreprises resteront dans l’indice, du moins pour le moment.

Les différentes approches soulignent l’incertitude du marché sur le court terme. Sur le long terme, le plein impact de ces sanctions n’apparaîtra sans doute qu’après le 11 novembre, le délai fixé par les Etats-Unis. Mais, cette situation peut aussi offrir des possibilités étant donné que certaines entreprises reposant sur de bons principes fondamentaux pourraient devenir plus aisément accessibles.

Malgré les questions laissées en suspens sur certains noms chinois, il y a peu de risque que les investissements ESG nationaux ne se développent pas.

En particulier, le soutien concernant le bien-fondé des investisseurs en obligations ESG croît en Chine. Un rapport de l’institut CFA réalisé en 2019 en coopération avec les Principes des Nations Unies pour l’Investissement Responsable a montré que les spécialistes financiers chinois s’attendent à ce que les problèmes liés aux facteurs ESG aient un impact plus fréquent sur les rendements et les marges des obligations d’ici 2022. Plus spécialement, 57 % ont déclaré que les problèmes de gouvernance influenceront les rendements/la marge des obligations d’entreprises en Chine d’ici 2022, vs. 26 % en 2017. En ce qui concerne les problèmes environnementaux, le pourcentage était de 48 % d’ici 2022, vs. 13 % en 2017, et pour les problèmes sociaux, le score était de 43 % d’ici 2022, contre 17 % en 2017.

La valeur ajoutée ESG

Du point de vue global, il existe un groupe de recherche encore plus étendu qui présente les avantages de l’intégration ESG sur une plus grande échelle. Ceci attire les investisseurs en obligations à la recherche de rendements et les portefeuilles centrés sur la référence afin d’attribuer un rôle plus important à la durabilité dans le risque d’investissement.

Bref, les études ont montré que les fonds obligataires centrés sur les critères ESG ont tendance à être plus résilients vis-à-vis du risque à la baisse, comparés aux fonds traditionnels. Selon les recherches menées par Fidelity par exemple, consacrées aux neufs premiers mois de 2020, les entreprises présentant de bonnes caractéristiques affichent une gestion plus prudente et s’avéreront plus robustes en cas de crise.

En conformité avec ces résultats, bien qu’étalés sur une courte plage de neuf mois, les obligations des 154 entreprises pourvues d’un score ESG élevé, ont affiché un rendement d’environ -0,5 % en moyenne, comparé à -1,5 % pour les 557 entreprises ayant affiché un score moyen et -4,6 % pour les 225 entreprises caractérisées par un mauvais score ESG.

Par ailleurs, l’étude a signalé que le marché discrimine les entreprises en s’appuyant sur leur engagement en matière de durabilité, pour ce qui est de la faillite ou de la reprise.

C’est pourquoi, il est important de pouvoir justifier la durabilité afin de lui attribuer un rôle plus important dans la gestion active des portefeuilles.