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2023, l’année du retour pour les marchés émergents?

Décevants en 2022, les marchés émergents pourraient rebondir cette année, notamment dans la foulée des mesures de relance préconisées par Pékin et du potentiel de consommation accumulé par les ménages chinois.

La Chine pourrait connaître un boom après les vacances du Nouvel An lunaire, fin janvier. Surtout que la demande refoulée est considérable et que les ménages disposent d'une quantité record de liquidités.
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La Chine pourrait connaître un boom après les vacances du Nouvel An lunaire, fin janvier. Surtout que la demande refoulée est considérable et que les ménages disposent d'une quantité record de liquidités.
Alain Barbezat
BCV - Responsable de la gestion des actions des marchés émergents
26 janvier 2023, 20h20
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En nous retournant sur 2022, on ne peut qu'être impressionné par la variété et l'ampleur des chocs qui ont affecté les économies et les marchés. Qu’est-ce que cela dit pour 2023 pour une classe d’actifs dont on attend toujours le retour, les marchés émergents? L'éventail des problèmes qu’ils devront affronter reste large. A commencer par l’évolution de l’activité, notamment en Chine.

L'assouplissement de la politique zéro Covid en Chine s'est fait d’abord progressivement avant d’accélérer fortement. Un tel retour au pragmatisme était impensable encore début décembre, mais a engendré son lot de conséquences sur la mobilité et l'activité économique en fin d’année. En 2022, la croissance aura donc été de 3%, le deuxième plus faible taux de croissance depuis 1976 et un niveau synonyme de récession pour l’empire du Milieu. Cependant, les chiffres de la production industrielle et des ventes au détail ont été meilleurs qu’anticipé par les économistes en décembre, un signe encourageant pour le futur proche.

Potentiel de consommation

Pour l'instant, les consommateurs restent prudents. Mais la Chine pourrait connaître un boom après les vacances du Nouvel An lunaire, fin janvier. Surtout que la demande refoulée est considérable et que les ménages disposent d'une quantité record de liquidités. En outre, la politique du gouvernement est désormais clairement axée sur le soutien à la croissance. Ce qui suggère une reprise des ventes de biens immobiliers et de la construction de logements. Sans même parler des industries lourdes connexes. Dans une certaine mesure, ce coup de pouce sera contrebalancé par la modération des investissements dans les infrastructures et la baisse de la demande d'exportations. Néanmoins, le PIB chinois pourrait croître de 5% ou plus en 2023.

Trois éléments fondamentaux

Sur ce chemin vers le pragmatisme, les investisseuses et les investisseurs doivent garder à l'esprit trois éléments pour ces prochains mois. Premièrement, la Chine devrait être la seule grande économie engagée dans un assouplissement de ses politiques fiscale et monétaire. Deuxièmement, les ménages chinois épargnent depuis le début de la pandémie. Les soldes bancaires des familles ont ainsi augmenté de 42% depuis début 2020. L'augmentation nette des comptes bancaires des ménages au cours de cette période se monte à 4800 milliards de dollars, soit 20% du PIB. Troisièmement, ces fonds devraient soutenir un rebond de la consommation en Chine et une reprise du marché des actions. La Chine étant devenue une zone où il était difficile pour beaucoup d’investir en 2022, les détenteurs d'actions chinoises sont aujourd’hui principalement les Chinois eux-mêmes.

A plus long terme, le potentiel de croissance est peut-être menacé par une démographie déficiente. Le 17 janvier, le Bureau national de la statistique a officiellement confirmé le premier déclin de la population chinoise depuis l’année de la Grande Famine de 1961. La population totale de la Chine a diminué de 850.000 personnes en 2022, pour atteindre environ 1,41 milliard d'habitants. Avec 9,56 millions de bébés, 2022 enregistre le nombre de naissances le plus bas depuis au moins 1950, malgré les efforts du gouvernement pour encourager les familles à avoir plus d'enfants.

L'abondance de main-d'œuvre a été l’un des principaux moteurs de la croissance rapide de la Chine depuis plus de quarante ans. Il conviendra d’observer attentivement les futures initiatives gouvernementales visant à contrer les impacts négatifs de ce recul démographique (hausse des coûts de main-d’œuvre, par exemple) et à améliorer la productivité économique dans les années à venir.

Autres marchés asiatiques

Une reprise chinoise aura comme effet d’entraîner une forte reprise de l’activité en Corée du Sud et à Taïwan, économies cycliques par excellence. Ce renouveau économique devrait avoir lieu au cours du second semestre 2023.

Le niveau particulièrement déprimé des évaluations constitue un autre atout de ces marchés. Les récents développements en Corée du Sud en matière de gouvernance (hausse envisagée des ratios de distribution de dividendes de la part des banques, démantèlement de certaines participations croisées au sein de grands groupes tel que Samsung, etc.) aura également comme conséquence la réduction, voire la disparition à terme, de l’escompte de valorisation actuel de ce marché par rapport aux autres marchés asiatiques.

Résilience à la force du dollar

En Amérique latine, les marchés intérieurs du Brésil et du Mexique sont demeurés stables. Preuve que toute crise mondiale ne doit pas nécessairement frapper simultanément tous les marchés émergents. Malgré le renforcement du dollar, la croissance des pays latino-américains – ainsi que d'une grande partie du Moyen-Orient ou de certaines régions d'Asie du Sud-Est – a été étonnamment résistante.

L’impact négatif de la force du dollar a touché les monnaies de ces pays sans qu’il ne se propage trop dans leurs économies. Les marchés émergents semblent s’être donc passablement renforcés depuis les précédentes crises de liquidité.