On parlait auparavant de villes créatives. C’était du temps de Richard Florida et de l’émergence du concept de classe créative («The Rise of the Creative Class», éd. Basic books, 2002). Bien avant que les termes de wokisme, rébellion climatique et complotisme n'apparaissent et ne contaminent les institutions notamment universitaires. Un temps où la métropole lémanique brillait d’espérance poussée par le désir ambitieux de faire de l’EPFL un phare international.
Ce temps est passé. Le soufflet s’est dégonflé. Qu’en reste-t-il?
D’abord le terme de «créativité» a été remplacé par celui de «smart». Ensuite les réseaux sociaux se sont insidieusement substitués aux journaux dans la quête d’informations. Enfin, l’intelligence artificielle est devenue le véritable enjeu caché des Etats loin devant la transition digitale ou écologique. Pour preuve, on compte plus de 108 professeurs au Centre d’intelligence artificielle du Poly de Zurich (ETHZ) contre 36 en sciences de l’environnement. Un déploiement de moyens qui en dit long sur les choix stratégiques de la haute école, totalement éloignés des discours politiques pour qui la réalité des faits n’est pas une priorité. Tout est dans le perçu, semble dire cette classe légiférante.
Il faut bien l’admettre Zurich fait tout juste et la Romandie tout faux ou presque
Xavier Comtesse
Faisons le point sur ce changement de perspectives car il faut bien l’admettre Zurich fait tout juste et la Romandie tout faux ou presque. Un vent d’avenir souffle sur la ville de la Limmat avec une NZZ à nouveau très lue, influente et moderne, avec des expositions d’art courues et des entreprises high-tech, comme Google, IBM ou Infosys qui sont venus chercher la créativité zurichoise, et sans oublier des centres universitaires résolument tournés vers le futur.
Le monde nouveau semble remplacer petit à petit l’ancien avec les quartiers de Züri-West de la fintech, de la crypto ou de l’IA qui semble effacer la finance de Paradeplatz. Les déboires de Credit Suisse ont entamé le crédit de la finance d’affaires mais pas celui du foisonnement de start-up de la jeunesse entrepreneuriale. Un monde bouge. Un monde change. Zurich refait surface sur la carte des villes «smart». En fait, carrément 2e mondiale au classement IMD. «Zurich is back».
Nos institutions telles que l’Université de Genève qui tremble sous le wokisme, celle de Lausanne sous l’activisme climatique et Neuchâtel sous les hackers, etc
Xavier Comtesse
Mais peut-on en dire autant de la métropole lémanique et de la Suisse romande? Non, bien sûr! La question est sur toutes les lèvres: où sont donc passées les années Patrick Aebischer? Bien sûr le président de l'EPFL entre 2000 et 2016 n’a pas fait tout juste mais il a su insuffler de l’énergie, de l’envie sur tout le territoire. Aujourd’hui, on aurait bien besoin d’un tel souffle au regard de notre situation universitaire dégradée par la mise à l’écart des programmes Horizon par l’Union européenne.
De plus, comment réveiller nos institutions telles que l’Université de Genève qui tremble sous le wokisme, celle de Lausanne sous l’activisme climatique et Neuchâtel sous les hackers, etc. Nos énergies sont mobilisées ailleurs pendant que l’essentiel avance sans nous. Il faut un plan d’actions autour de l’IA qui ferait appel au créatif et au smart. Le créatif fait référence à l’imagination, au design thinking et le smart désignant l’automatisation des fonctions urbaines et institutionnelles. Seule la combinaison des deux est gagnante. Zurich l’a compris!