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Un autre destin pour l’UDC

Il faut que la Berne fédérale apporte des solutions pragmatiques plutôt que d’agiter des revendications à visées électorales. Par Jacques Neirynck

«L’UDC renoncera-t-elle aux gains faciles, en soutenant au contraire des mesures impopulaires comme celles qui sont requises pour le climat?»
KEYSTONE
«L’UDC renoncera-t-elle aux gains faciles, en soutenant au contraire des mesures impopulaires comme celles qui sont requises pour le climat?»
Jacques Neirynck
Ancien conseiller national
30 octobre 2023, 14h24
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En simplifiant à l’extrême, on pourrait récapituler les dernières élections en pointant deux thèmes: la migration qui fut porteuse pour l’UDC, qui a recruté de nouveaux électeurs dans tous les autres partis; le climat qui n’a pas empêché les Verts d’en céder aux autres partis et de n’en recruter aucun. Le slogan «Non à une Suisse à 10 millions» a marqué les esprits avec ses arguments péremptoires, pénurie d’appartements, coût de la santé, encombrement des routes, comme si les migrants en étaient les responsables. En revanche, les refrains moralisateurs du discours écologiste ont hérissé l’électorat.

Or les deux affaires sont liées. Le réchauffement climatique jette sur les routes des jeunes gens ambitieux qui ne supportent pas la gabegie de leurs pays, déjà impactés par la sécheresse montante, par le renchérissement du pétrole, par les incendies de forêts. Les guerres qui se rallument un peu partout n’arrangent pas les choses.

Une planète en dégradation rapide ne soutient plus une population croissante. La nature régule la démographie par ses mécanismes traditionnels, peste type Covid, famine et guerre, les trois fléaux s’engendrant mutuellement, sans que l’on puisse maîtriser l’un indépendamment des autres. Face à un défi planétaire, il faut une réponse globale. Telle est la question posée au grand vainqueur des élections. L’UDC deviendra-t-elle maintenant un parti de gouvernement? Renoncera-t-elle aux gains faciles, en soutenant au contraire des mesures impopulaires comme celles qui sont requises pour le climat?

Il ne s’agit plus de croître mais de stabiliser, de consommer mais d’épargner, de dissiper mais d’investir

Jacques Neirynck

Nous sommes confrontés à une nouvelle révolution industrielle qui se déroulera de toute façon dans les pays acceptant le défi: renoncement total aux énergies fossiles, développement de l’énergie solaire, mutation des emplois par la numérisation et l’intelligence artificielle, adaptation de l’agriculture au nouveau climat, ajustement de l’habitat, contrôle de la démographie, pacification des relations internationales, évolution des institutions politiques, instauration d’un pouvoir supranational. Au bout de ce processus compliqué se situe une Terre promise moyennant l’inévitable traversée d’un désert.

Or la réussite électorale de l’UDC, fondée essentiellement sur un discours passéiste, fait inévitablement penser à la Bible lors de la traversée du Sinaï où les migrants juifs se languissaient des marmites pleines de viande de l’Egypte. On ne peut avancer, on ne peut atteindre la sécurité, on ne peut garantir la survie qu’en renonçant aux délices des mythiques Trente Glorieuses.

Il ne s’agit plus de croître mais de stabiliser, de consommer mais d’épargner, de dissiper mais d’investir. Il faut donc que la Berne fédérale empoigne les dossiers rébarbatifs de la migration, du climat, de l’Europe, de la santé, du pouvoir d’achat, tous inextricablement liés, en y apportant des solutions pragmatiques plutôt qu’en agitant des revendications à visées électorales. Ce Parlement nouveau doit agir plutôt que réagir, accomplir plutôt qu’agiter, créer plutôt que conserver. L’UDC peut et doit choisir un autre destin que d’être l’inspirateur d’anxiétés et le conservateur d’un musée passéiste.