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Trois votes qui divisent

Le Conseil fédéral sait que la victoire dans une votation s’obtient en mobilisant une majorité qui n’est pas celle des membres d’un parti. Par Jacques Neirynck.

«Le secret du système helvétique qui n’a cherché à imposer ni une langue, ni une religion commune.»
KEYSTONE
«Le secret du système helvétique qui n’a cherché à imposer ni une langue, ni une religion commune.»
Jacques Neirynck
Ancien conseiller national
29 août 2022, 12h54
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Le 25 septembre nous voterons sur trois objets controversés: Initiative sur l’élevage intensif, Stabilisation de l’AVS (AVS 21), Modification de la loi fédérale sur l’impôt anticipé. Chacun passera ou non selon la façon dont les électeurs se diviseront en fonction de leurs intérêts les plus stricts et les plus légitimes.

L’élevage intensif est une nécessité pour les campagnes, qui refuseront l’initiative, tandis que des citadins, saisis de pitié devant les souffrances réelles ou imaginaires des animaux de boucherie, la soutiendront

La stabilisation de l’AVS s’obtient en retardant d’une année la retraite des femmes. Elle sera appuyée par les hommes et ne trouvera pas de majorité parmi les femmes.

La modification de la loi fédérale sur l’impôt anticipé sera soutenue par ceux qui possèdent des obligations et refusée par les autres, nantis contre démunis.

Seul le second objet a des chances de l’emporter à une majorité consistante. Les deux autres sont tangents.

Le Conseil fédéral sait d’expérience que la victoire dans une votation s’obtient en mobilisant une majorité, qui n’est pas celle des membres d’un parti, mais celle d’une classe sociale, rassemblée pour la défense de son intérêt particulier. Comme toutes les factions réussissent à un moment ou un autre à emporter une votation, la gouvernance semble s’opérer dans la concordance.

Des défis plus importants attendent le gouvernement, comme le réchauffement climatique

Jacques Neirynck

Cependant, celle-ci n’est pas identique au consensus, qui serait obtenu par des objets de votation réunissant une large majorité, bien au-delà d’une classe sociale particulière, telle qu’il n’y ait ni vainqueur, ni vaincu. Par sa composition la Suisse est un assemblage de peuplades diverses, dont le lien spécifique est l’art du consensus. Après un débat ouvert, la réussite implique le ralliement aussi large que possible autour d’un projet commun.

En revanche, une votation emportée à 50,1% constitue un échec tangible du système de démocratie directe, car il y a autant d’aigris que de satisfaits. La véritable définition de la démocratie n’est pas le pouvoir de la majorité mais le respect de toutes les minorités. C’est le secret du système helvétique qui n’a cherché à imposer ni une langue, ni une religion commune.

Il y a donc lieu de proposer des textes de lois longuement réfléchis, qui ne visent pas à recruter une faction au détriment des autres. La composition des exécutifs aux trois niveaux fédéral, communal, cantonal ambitionne d’obliger la rédaction de compromis généreusement acceptés par tous, sans arrière-pensée. Force est de constater que les trois objets du 25 septembre ne répondent pas à cette règle.

Si la prolongation de la durée du travail avait été d’un an pour tout le monde, le risque était grand d’un refus. L’acceptation sera le fait d’un sexe, toujours paradoxalement en position dominante et privilégiée par opposition à l’autre. Au mieux le système de l’AVS sera stabilisé jusqu’en 2030 et puis il faudra à nouveau affronter le défi d’une opinion publique rétive à toute prolongation de la durée du travail.

Des défis plus importants attendent le gouvernement, comme le réchauffement climatique. Le travail législatif devra se concentrer sur des formules rassemblant la plus large majorité.