La finance durable devrait et pourrait faire la différence. Mais, si les approches ESG se précisent, les grilles d’analyse sont encore loin d’être harmonisées. Le récent compromis franco-allemand autour du nucléaire et du gaz, considéré l’un comme «vert» et l’autre comme «énergie de transition», montre à quel point la taxonomie européenne reste l’objet de marchandages politiques. Toutefois, une base, même insuffisante et contestable, a le mérite essentiel d’exister et permettra à des référentiels privés ou publics plus exigeants d’apparaître.
Une norme ISO, fondée sur des nomenclatures comme ISO 9000 ou ISO 26000 et reprenant les contenus du Pacte global des Nations Unies (Global compact), serait ici judicieuse pour offrir un cadre de référence universellement reconnu. Dans cette perspective, l’Agenda 2030 avec ses 169 cibles regroupées en 17 Objectifs de développement durable fournira également un appui précieux.
Mais la réconciliation entre bénéfices écologiques, sociaux et financiers ne pourra pas se limiter à une grille de critères pour investissements et prêts durables, aussi pertinente soit-elle. Il y a aussi une réflexion à mener sur les taux de retour attendus, car des exigences abusives représentent par définition une pression excessive sur l’appareil productif et les consommateurs, au seul bénéfice des investisseurs et des prêteurs.
Il est temps de donner congé au seul PIB, au profit de l’indicateur de développement humain
René Longet
Il s’agira aussi d’inscrire dans les comptabilités, qui à ce jour se limitent à la seule dimension financière, une approche globale du bénéfice apporté par l’activité économique déployée. Dès lors, l’entreprise attestera les impacts environnementaux et sociaux de ses productions - peu importe si les externalités positives non honorées par le marché ont été compensées par des subventions, et les externalités négatives par des taxes. Enfin, on devra apprendre à comptabiliser également la valeur des services écosystémiques auxquels on a fait appel.
Finalement, sur le plan de la gouvernance des territoires, il sera temps de donner congé au seul PIB, au profit de l’indicateur de développement humain, qui lui ajoute le taux de scolarisation, l’espérance de vie et «le niveau d’émissions de dioxyde de carbone et la consommation de matières d’un pays, par habitant». A moins de lui préférer le BNB - bonheur national brut -, qui nous rappelle que toutes nos activités ne font sens que si elles augmentent réellement notre bien-être.