Les yeux rivés sur les écrans, le pouce fébrile: un trajet en M2 entre la gare et le Flon suffit pour mesurer l’omniprésence de nos smartphones dans notre quotidien. Et la déprime profonde que provoquerait son absence ou, pire, une lenteur de débit dans le «dopaminomètre»… En entreprise, la digitalisation galopante des processus, des systèmes et des produits draine son lot de données. Professionnellement, l’envoi d’un document qui ne réagirait pas au millième de seconde de clic de mulet génère un énervement d’impatience virale. Sans disserter sur la pertinence de ces réactions psychologiques ni sur ce raz-de-marée de données de loisirs ou professionnel, un constat s’impose: nos données mobiles doublent tous les dix-huit mois.
Cette réalité pose évidemment la question de notre capacité à répondre au transit de ces informations. Sans antenne, pas de communication! Mais voilà, en termes d’infrastructure, nous avons le désagréable sentiment en Suisse de vivre sur nos acquis. Train, route, énergie et communication, la saturation menace. Finalement, c’est notre niveau de développement qui stagne coupablement. Prononcez «5G» et certains seront pris de spasmes, un troisième bras nous pousserait même. Cette technologie pâtit en effet depuis de trop nombreuses années des méfaits que certains lui prêtent.
Nous sommes clairement en train de manquer le train de la numérisation et de l’innovation.
Philippe Miauton
Dernièrement une étude scientifique, publiée dans un rapport fédéral, a largement démontré que les rayonnements diminuent grâce à cette technologie. Et ce malgré une augmentation des données transmises. En résumé, des conséquences négatives pour la santé peuvent être exclues. Rappelons que les antennes 5G présentent de nombreux avantages non négligeables par rapport à la 4G: même quantité de données transmise avec moins de rayonnement, cinq fois plus rapide, jusqu’à six fois plus durable et elle utilise 85% d’électricité en moins…
Pourtant, rien n’y fait. Fin 2021, 3000 oppositions aux niveaux cantonal et communal bloquaient toujours le déploiement de ce réseau. De moratoires en lenteurs administratives, ce sont plus de 500 dossiers «schubladisés» qui attentent une réponse de l’Etat, soit le taux le plus élevé du pays. Alors que la Suisse faisait office de précurseur en matière de réseau, notre avance a désormais fondu comme neige au soleil par rapport aux pays développés. Nous sommes clairement en train de manquer le train de la numérisation et de l’innovation.
C’est une multitude de domaines qui est concernée. En effet, la 5G offre des opportunités dans le secteur industriel (développement de nouvelles applications pour augmenter la productivité, améliorer la planification des ressources ou rendre plus efficients les processus de production), de la santé (transmission en temps réel des données vitales, télésurveillance sanitaire), de l’énergie (surveillance et prévisibilité des flux des énergies renouvelables, régulation des systèmes de chauffage, des stores ou de la climatisation), etc. De nouvelles antennes qui permettraient en outre de réduire la fracture numérique entre ville et campagne, là où la fibre optique est trop coûteuse ou pas possible.
Les nuages d’un Moyen-Âge numérique s’amoncellent coupablement. Dans ce contexte, il faut que nos autorités empoignent ce dossier et qu’elles remettent l’antenne au milieu du village.