Trouver du personnel, qualifié ou non, est devenu la principale préoccupation d’une majorité d’entreprises selon notre récente enquête. Avec le départ à la retraite des baby-boomers et le faible taux de natalité, la pénurie de main-d’œuvre va encore s’aggraver. Quelque 430.000 personnes manqueront d’ici 2040 sur le marché du travail suisse. A l’évidence, tous n’ont pas encore pris la mesure du problème. Certains, notamment les syndicats, militent pour une semaine de quatre jours à salaire égal. L’UDC propose, à nouveau, de limiter l’immigration quitte à résilier la libre circulation des personnes avec l’Union européenne (UE).
Economiesuisse et l’Union patronale suisse sont montées au créneau la semaine passée. Elles appellent à prendre – ou à renforcer – sans tarder des mesures à trois niveaux.
Encourager la main-d’œuvre indigène à travailler davantage
C’est tout sauf gagné vu l’aspiration toujours plus largement partagée à une existence plus «équilibrée» et à moins travailler, comme en témoigne entre autres le sensible accroissement du temps partiel chez les hommes.
Une partie de la solution consiste à (re)donner du sens au travail, l’autre à améliorer la conciliation vie professionnelle-vie privée. Côté employeurs: horaires flexibles de travail, horaires annualisés et télétravail par exemple. Côté autorités: horaires scolaires continus, crèches en suffisance et à des prix abordables, imposition individuelle des couples et réduction de la progressivité de l’impôt sur le revenu.
Une partie de la solution consiste à (re) donner du sens au travail, l’autre à améliorer la conciliation vie professionnelle-vie privée.
Cristina Gaggini
Parallèlement, il s’agit d’inciter les seniors à rester plus longtemps sur le marché du travail, notamment en allégeant le coût de la LPP, en changeant les mentalités chez les employeurs et en permettant aux seniors qui le désirent de réduire leur taux d’activité et d’adapter leur cahier des charges avant et après l’âge de la retraite. Enfin, l’Etat doit cesser de créer des emplois à tout-va, ce qui prive de personnel les autres secteurs.
Pouvoir continuer à recruter du personnel étranger sans tracasseries
La libre circulation des travailleurs européens doit impérativement être maintenue. Et les contingents pour Etats tiers régulièrement adaptés aux besoins. Mais il est tout aussi important de préserver l’attractivité et l’image de la Suisse à l’étranger.
Les Etats se livrent en effet une concurrence acharnée pour attirer des talents. L’UE souffre elle aussi déjà du vieillissement de la population; les Etats-Unis et la Chine suivront bientôt. En clair, il sera de plus en plus difficile de combler le manque de personnel indigène par l’immigration.
Préserver la liberté d’entreprendre et d’innover
Numérisation, robotisation, intelligence artificielle devraient nous permettre d’atténuer la pénurie de main-d’œuvre. Cela présuppose d’assurer des conditions compétitives en matière de formation et de recherche, une formation continue et de reconversion à la hauteur des enjeux et des réglementations sveltes.
Le chantier est vaste. L’enjeu de taille pour la prospérité du pays. Une action déterminée et concertée entre milieux économiques et politiques s’impose.