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Credit Suisse: analyser les événements avant de prendre des décisions hâtives

La colère après la débâcle de la banque, que nous partageons, est mauvaise conseillère. Par Cristina Gaggini

«Si les appels à une séparation des activités bancaires, à une scission de CS suisse ou à des garanties pour l’emploi étaient suivis, UBS se retrouverait inévitablement sous pression dans une phase de transformation délicate.»
KEYSTONE
«Si les appels à une séparation des activités bancaires, à une scission de CS suisse ou à des garanties pour l’emploi étaient suivis, UBS se retrouverait inévitablement sous pression dans une phase de transformation délicate.»
Cristina Gaggini
Economiesuisse - Directrice romande
11 avril 2023, 10h00
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La débâcle de Credit Suisse nous a tous pris de court. Sans l’intervention du Conseil fédéral, de la Banque nationale et de la Finma, cette banque d’importance systémique aurait peut-être provoqué, du jour au lendemain, une crise mondiale des marchés financiers et des dommages impossibles à quantifier pour l’économie suisse.

Cette très fâcheuse situation, dont on se serait bien passé, n’est pas représentative de la situation de la place bancaire dans son ensemble. Nous comptons quelque 240 établissements solides.

Par ailleurs, depuis la crise financière, les exigences réglementaires ont été durcies. Les risques ont été nettement réduits. En 2006, juste avant la crise financière, le bilan combiné de CS et UBS représentait sept fois le PIB de la Suisse contre deux fois aujourd’hui. Sans compter qu'UBS veut réduire significativement la banque d’investissement de CS. La réglementation «too big to fail» a eu pour effet que les deux grandes banques détiennent beaucoup plus de fonds propres et de liquidités qu’en 2008.

Le rachat de CS a été possible uniquement parce qu’UBS est si bien capitalisée aujourd’hui. Et si CS n’avait pas disposé de substance et de liquidités suffisantes, la banque aurait probablement fait faillite en automne dernier déjà, lors des très importants retraits de la part de ses clients. A cet égard, la réglementation «too big to fail» fonctionne. Certes, en cas de crise, elle prévoit la liquidation de CS et une scission des activités suisses. La course contre la montre étant enclenchée, les autorités n’ont pas voulu prendre le risque de provoquer une crise financière mondiale. A raison.

Verser des bonus d’une telle ampleur quand on enregistre des milliards de pertes ne saurait être une pratique durable

Cristina Gaggini

Par égard aux collaborateurs, aux actionnaires et aux détenteurs d’obligations de la banque aux deux voiles et pour restaurer la confiance des citoyens, un examen complet et transparent des événements s’impose. Le rôle de la Finma et de la BNS, le recours au droit d’urgence et la possibilité d’exiger la restitution de bonus des échelons supérieurs de CS doivent être clarifiés. La tête froide et en toute indépendance.

Il en va de même pour le dispositif «too big to fail»; il n’a en effet pas été établi si la débâcle était due à une défaillance de la réglementation.

Rappelons encore que verser des bonus d’une telle ampleur quand on enregistre des milliards de pertes ne saurait être une pratique durable. Une bonne gouvernance encourage la responsabilité.

A l’heure actuelle, la stabilisation de la situation doit être la priorité absolue. Si les appels à une séparation des activités bancaires, à une scission de CS suisse ou à des garanties pour l’emploi étaient suivis, UBS se retrouverait inévitablement sous pression dans une phase de transformation délicate. Or, nous avons surtout besoin d’apaisement jusqu’à ce que la reprise soit effective. Nous ne pouvons pas nous permettre d’affaiblir notre place financière par des décisions hâtives. La colère, que nous partageons, est mauvaise conseillère.