Selon les derniers sondages, l’initiative «pour la protection des enfants et des jeunes contre la publicité pour le tabac» sera largement acceptée. Il n’est pas trop tard pour se forger une opinion basée sur des faits et considérer la solide alternative proposée par le Parlement et le Conseil fédéral.
Les principales raisons qui incitent les jeunes à consommer des produits du tabac traditionnels et alternatifs sont l’attrait pour la nouveauté, l’effet de groupe et l’environnement personnel. Et non la publicité. Dixit Addiction Suisse, qui ne peut être soupçonné d’accointances avec l’industrie du tabac.
Autre fait: davantage de jeunes en France et en Italie fument, malgré une limitation plus drastique de la publicité sur le tabac qu’en Suisse.
La politique de notre pays porte ses fruits. Elle repose sur la prévention et - depuis 1995 déjà - sur l’interdiction de la publicité du tabac destinée aux enfants et aux jeunes. La majorité des cantons a adopté des règles encore plus strictes et la publicité est interdite à la radio et à la télévision. Les résultats sont là: le nombre de jeunes fumeurs réguliers de 15 ans a diminué de 49,7% entre 1986 et 2018 (Addiction Suisse).
Quel média ou lieu n’est en aucun cas accessible aux mineurs, quand bien même il ne leur est pas destiné?
Cristina Gaggini
Ne faut-il pour autant rien faire? Non. Le Parlement a élaboré une nouvelle loi sur le tabac qui renforce la protection de la jeunesse. Elle entrera automatiquement en vigueur si l’initiative est refusée. La vente de produits du tabac sera interdite, uniformément au niveau national, aux moins de 18 ans. La publicité sera interdite dans l’espace public (affichage, cinéma), ainsi que dans les journaux, sites internet et manifestations qui s’adressent spécifiquement aux jeunes. Elle restera possible, à juste titre, dans la presse, dans les kiosques et lors d’évènements destinés aux adultes. C’est là une différence majeure par rapport à l’initiative!
En effet, bannir toute publicité susceptible d’atteindre les enfants et les jeunes équivaut – de fait – à une interdiction totale de publicité, y compris celle qui s’adresse aux adultes! Quel média ou lieu n’est en aucun cas accessible aux mineurs, quand bien même il ne leur est pas destiné? L'impact économique est tout sauf dérisoire pour les nombreux acteurs qui bénéficient des recettes publicitaires et de sponsoring ou de la vente des produits du tabac. Pensons aux médias, aux manifestations culturelles et sportives déjà à la peine en raison de la pandémie, ainsi qu’aux kiosques et aux shops des stations-services notamment.
Autre conséquence de cette initiative: elle proscrit la publicité aussi des produits alternatifs (avec tabac chauffé ou sans tabac). Les consommateurs adultes de cigarettes traditionnelles ne seront pas incités à passer à ces produits pourtant moins nocifs. C’est absurde et contre-productif en termes de santé publique.
Conclusion: renforcer la protection de la jeunesse, oui. Mais pas en proscrivant toute publicité pour des produits légaux destinés à des adultes informés et responsables!