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Non à la police du fer à repasser

Le Conseil fédéral a mis en consultation une série de mesures trop pointilleuses à mettre en place en cas de pénurie d’électricité. Par Sophie Paschoud

«On voit mal, chez les particuliers du moins, comment s’assurer de leur respect, à moins de déployer un important dispositif policier chargé d’enquêter au sein des ménages.»
KEYSTONE
«On voit mal, chez les particuliers du moins, comment s’assurer de leur respect, à moins de déployer un important dispositif policier chargé d’enquêter au sein des ménages.»
Sophie Paschoud
Centre patronal - Juriste
08 décembre 2022, 12h00
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Nul ne peut ignorer le risque de pénurie d’électricité, dès lors qu’il est au cœur de l’actualité depuis plusieurs mois; les appels à réduire la consommation tout comme les conseils sur les moyens d’y parvenir foisonnent, à juste titre. Il s’agit en effet d’éviter la survenance d’un black-out.

Si les actions volontaires devaient ne pas suffire, le Conseil fédéral pourrait prendre des mesures contraignantes. C’est l’objet des projets d’ordonnances, qui traitent respectivement du contingentement (cas échéant immédiat), du délestage, ainsi que des restrictions et interdictions d’utilisation de l’énergie électrique. Sous réserve de certains éléments méritant d’être précisés, les premiers textes mentionnés apparaissent globalement acceptables. Il en va autrement du dernier.

Celui-ci prévoit, selon différents paliers en fonction de la situation, une liste de mesures extrêmement détaillée, qui s’appliqueraient aussi bien aux entreprises qu’aux ménages. On y trouve en particulier des restrictions quant à l’utilisation des sèche-linge, des fers à repasser et des lecteurs DVD; des normes sur la température des lave-linge et des frigos ou encore des réglementations touchant aux modes de déplacement (interdiction des trajets en voiture électrique). Le projet n’est en outre pas exhaustif et pourrait être complété par «d’autres interdictions ou d’autres précisions à la suite de la consultation».

Alors que les économies qu’on peut en attendre sont impossibles à évaluer concrètement, nombre de mesures apparaissent excessives

Sophie Paschoud

Ce pointillisme n’est pas sans rappeler celui qui avait présidé à l’élaboration, en pleine crise Covid, du catalogue délirant de biens non essentiels interdits à la vente. Des fonctionnaires fédéraux étaient allés jusqu’à se pencher sur le type de petites culottes qu’il restait possible d’acquérir.

En l’occurrence, alors que les économies qu’on peut en attendre sont impossibles à évaluer concrètement, nombre de mesures apparaissent excessives, pour ne pas dire chicanières. A cela s’ajoute qu’on voit mal, chez les particuliers du moins, comment s’assurer de leur respect, à moins de déployer un important dispositif policier chargé d’enquêter au sein des ménages. Le Conseil fédéral en a bien conscience et mise ainsi en partie sur le «rôle joué par le contrôle social», autrement dit sur la propension plus ou moins étendue de l’être humain à dénoncer son voisin, ce qui n’est pas particulièrement sain.

Face au risque de pénurie, il est normal d’en appeler à la responsabilité individuelle et d’attendre de tout un chacun qu’il fournisse un effort. Il est tout aussi normal que les autorités n’attendent pas que la situation soit critique pour envisager des mesures, y compris des mesures contraignantes. Le principe de la proportionnalité doit néanmoins être respecté.