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L’immobilisme genevois, chronique d’une tyrannie démocratique

Il est courant d’entendre les Genevois affirmer que «rien ne bouge» dans leur canton et il faut malheureusement leur donner raison. Par Arnaud Bürgin

«Le projet Praille-Acacias-Vernets (PAV), le serpent de mer de l’aménagement du territoire genevois!»
KEYSTONE
«Le projet Praille-Acacias-Vernets (PAV), le serpent de mer de l’aménagement du territoire genevois!»
Arnaud Bürgin
Fondation pour l’attractivité du canton de Genève (Flag) - Directeur
14 février 2024, 15h00
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Abraham Lincoln a déclaré que la démocratie était «le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple». Mais qu’en est-il vraiment dans un système démocratique où l’abstentionnisme est toujours supérieur au taux de participation? Est-ce vraiment le peuple qui choisit son destin quand plus de 60% de la population ne vote pas ou lorsqu’un même sujet est soumis en votation, plusieurs fois, avec un résultat parfois contradictoire? Inversement, notre système est-il toujours une démocratie quand un ou plusieurs citoyens empêchent ou retardent la réalisation de projets pourtant acceptés par une majorité de votants?

A Genève, ces questions trouvent une seule et même réponse, l’immobilisme. L’immobilisme qui paralyse la plupart des grands projets d’importance pour notre canton. Il est d’ailleurs courant d’entendre les Genevois affirmer que «rien ne bouge» dans leur canton et il faut malheureusement leur donner raison.

Prenons l’exemple du projet Praille-Acacias-Vernets (PAV), le serpent de mer de l’aménagement du territoire genevois! Ce projet, qui prévoit la construction de plus de 12.000 logements d’ici à 2050, est à nouveau pris au piège du jeu politique et des référendums, ce qui retarde d’autant plus sa réalisation. Notons toutefois qu’il avance au moins un peu, à la différence de la traversée de la Rade où l’on ne sait plus vraiment qui doit construire quoi, où ni comment?

Sur le plan culturel, le rejet, par un référendum communal, de la Cité de la musique, infrastructure d’importance cantonale, symbolise là encore une occasion manquée pour Genève. Ce projet envisageait de créer un espace combinant salles de concerts et centres de formation musicale, répondant au manque criant d’infrastructures musicales.

En matière de sport, malgré la renaissance du Servette FC et les succès du Genève-Servette Hockey Club, le manque d’infrastructures sportives de qualité à Genève reste un sujet épineux.

L’augmentation du nombre de référendums et de votations répétitives sur les mêmes sujets est peut-être également une conséquence du désamour des jeunes pour la «chose politique»

Arnaud Bürgin

Dernier exemple de cet immobilisme, la loi sur les estimations fiscales de certains immeubles, acceptée par le peuple en juin dernier, mais dont l’entrée en vigueur est bloquée dans les méandres de recours judiciaires.

Face à ces exemples, l’impact sur la démocratie participative à Genève mérite une attention particulière. Faciliter l’exercice de la démocratie est louable, mais quand le taux de signatures pour lancer un référendum ou une initiative est trop bas, le zèle référendaire permet de remettre en question, ou à tout le moins retarder, tout projet d’importance pour notre canton. L’augmentation du nombre de référendums et de votations répétitives sur les mêmes sujets est peut-être également une conséquence du désamour des jeunes pour la «chose politique», puisqu’à Genève, les citoyens âgés de 90 ans et plus votent plus que les moins de 35 ans…

Entre la volonté de préserver une démocratie la plus participative possible et le risque de sombrer dans une forme de paralysie décisionnelle, le chemin est étroit. Genève risque de projeter une image de stagnation, nuisant à son attractivité et à sa capacité d’évolution, alors que l’accent devrait être porté sur notre capacité à avancer, à nous développer et à innover.