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Les complications de l’AVS

L’initiative qui propose une 13e rente est une mesure mal ficelée, qui rendra encore plus opaque le système des pensions et dispensera de l’indexation. Par Jacques Neirynck

«Actuellement la Confédération finance déjà 20% du budget de l’AVS.»
KEYSTONE
«Actuellement la Confédération finance déjà 20% du budget de l’AVS.»
Jacques Neirynck
Ancien conseiller national
16 janvier 2024, 15h00
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Nous voterons en mars sur un 13e mois pour l’AVS, destiné à compenser la perte de pouvoir d’achat des retraités, par suite de l’inflation qui n’est pas entièrement compensée. C’est une façon compliquée de remplacer une opération simple et évidente, l’indexation systématique.

La rente minimale pour une personne seule se monte actuellement à 1225 francs par mois et la rente maximale à 2450 francs (3675 francs pour un couple). Des montants aussi faibles sont évidemment sensibles au moindre renchérissement, à commencer par l’augmentation des primes de l’assurance maladie obligatoire. Ce n’est pas une assurance mais un impôt de capitation, qui est compensé par des subsides jusqu’au tiers de la population. Quel sens à un impôt pour les uns subventionné par les impôts des autres?

Dans le système de pensions coexistent deux types de systèmes de retraites: le système dit par répartition (l’AVS) et les systèmes dits de capitalisation, sous forme de fonds de pension (2e pilier et 3e pilier). Mais ce n’est qu’en théorie que l’AVS repose sur le principe où les cotisations des actifs garantissent les rentes des retraités. Actuellement la Confédération finance déjà 20% du budget de l’AVS. Cet argent ne tombe pas du ciel, il provient des impôts et des taxes supportés par tout le monde, y compris les retraités qui paieront plus cher la TVA sur leur consommation. On reprend d’une main ce que l’on a donné de l’autre.

La votation de mars alimentera un débat confus par la nature même d’un système aussi compliqué que possible

Jacques Neirynck

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? Parce que le citoyen moyen n’y voit plus clair. Idéalement, on pourrait soit revenir au principe du financement par la seule répartition, soit passer à un financement intégral par la caisse publique, mais on ne sort pas aisément d’une impasse politique. Concrètement, on devrait assurer une rente raisonnable pour les travailleurs les plus défavorisés. Le 13e mois est une mesure mal ficelée, qui rendra encore plus opaque le système des pensions et dispensera de l’indexation.

Or, il existe une autre dimension au problème: la durée du travail. Il saute aux yeux que l’augmentation de l’espérance de vie péjore un système de répartition. Si la durée de vie au-delà de la retraite double sur quelques décennies grâce aux progrès de la médecine, il n’y a que trois paramètres sur lesquels jouer: les cotisations, les rentes, la durée de la retraite. Pour compenser intégralement la charge doublée, il faut doubler une des deux premières ou maintenir la troisième en retardant l’âge de la retraite. Tout le reste est poudre aux yeux.

On peut argumenter que pour quelques années encore l’AVS dispose de réserves suffisantes. Ou bien minorer l’augmentation des cotisations à seulement 0,8%, répartie artificiellement par moitié entre employeur et employé, comme si ce qui compte réellement n’est pas le véritable coût salarial. En fait, ce 13e mois renchérit mathématiquement. La dépense de 13/12 = 1,083 soit 8,33%, dix fois plus que les 0,83%.

En démocratie, il faut absolument pratiquer une politique transparente. Or la votation de mars alimentera un débat confus par la nature même d’un système aussi compliqué que possible, aussi opaque que l’on puisse le bricoler. Ce n’est pas respecter le citoyen que de le confondre.