Il y a une dizaine de jours, le canton de Vaud a mis en ligne sur son site internet la liste des dons perçus par les partis politiques, dont la publication a été rendue obligatoire à la suite d’une révision législative entrée en vigueur le 1er janvier 2022. Cette publication, censée assurer une meilleure transparence du financement de la vie politique vaudoise, porte sur le montant global des dons reçus ainsi que sur la liste nominative des donateurs de montants de 5000 francs ou davantage.
A cette occasion, le POP a jugé opportun de se fendre d’un communiqué offusqué pour dénoncer ce qu’il semble considérer comme un authentique scandale: le promoteur immobilier Bernard Nicod a consenti des dons au PLR et à l’UDC de respectivement 7000 et 10.000 francs. L’extrême gauche estime apparemment qu’il s’agit là d’un intolérable affront fait aux locataires, qui voient «leur» argent financer une droite dont les turpitudes ne sont plus à démontrer.
Cette réaction somme toute assez ridicule a permis à la presse de noircir quelques lignes durant le creux de l’été et aux utilisateurs de réseaux sociaux de «poster» moult commentaires plus ou moins inspirés, et à l’orthographe parfois originale, avant de se désintéresser de cette histoire et de passer à d’autres sujets d’indignation ou de sarcasmes.
Les nouvelles exigences en matière de transparence représentent pour les partis un nouvel outil de propagande
Sophie Paschoud
Cette non-affaire permet toutefois de confirmer les doutes que l’on pouvait nourrir quant à l’utilité et aux bienfaits des nouvelles exigences en matière de transparence. Si les données désormais publiques ne manquent – peut-être – pas totalement d’intérêt pour les électeurs, elles représentent surtout, pour les partis, un nouvel instrument de propagande, qui, comme on a pu le constater, ne rehausse pas le niveau du débat politique, lequel n’était déjà pas bien élevé.
La tendance aux invectives, aux procès d’intention, aux attaques personnelles, aux postures pseudo-morales, aux lamentations et aux discours émotionnels, déjà très présente précédemment, n’en est que renforcée.
Aux côtés des partis du peuple et des partis populistes, des gentils et des méchants politiciens, des «valeurs progressistes» et des «idées rances» se trouvent désormais les bons et les mauvais donateurs.
En l’occurrence, il n’y a pas de souci à se faire pour Bernard Nicod, qui n’est pas homme à se laisser impressionner par les gesticulations du POP; il y a d’ailleurs répondu, dans une interview accordée au Blick romand, dans un style en parfaite conformité avec sa personnalité. Le PLR et l’UDC n’ont pas paru particulièrement émus et, de ce qu’on a pu lire comme réactions, les électeurs de ces partis non plus.
On ne peut toutefois pas exclure que la perspective d’être voué aux gémonies retienne à l’avenir certains donateurs potentiels. Il n’est pas non plus impossible que les partis, déjà prompts à privilégier les calculs électoraux aux véritables questions de fond, y ajoutent de longues palabres quant à l’opportunité d’accepter les dons de telle personnalité ou de telle entreprise si leur image était susceptible d’en pâtir.
Tout cela n’est sans doute pas bien grave; mais ce n’est pas très sain non plus.